Il est triste de jouer à cache-cache dans ce monde où l'on devrait se serrer les uns contre les autres. (Perséphone)

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a décision était la plus sûre et la plus hasardeuse en même temps, et Perséphone en avait bien conscience. Hasardeuse, oui, car frapper à la porte d'un couple qui commençait certes à la connaître, mais sans non plus faire forcément partie de leurs plus proches amis pour leur demander de l'héberger, c'était quand même sacrément culotté. Un genre de culot qui ne lui ressemblait pas, d'ailleurs. Mais d'un autre côté, cet endroit était sûre, Penny était adorable et Andrew accepterait peut-être de la protéger. C'était la plus saine combinaison possible. Et puis, ce n'était pas comme si elle avait de nombreuses autres options non plus. Si Penny et Andrew devaient refuser de l'aider, elle se tournerait vers Léo (elle était sûre qu'il accepterait, mais elle ne voulait pas le mêler à tout ça), mais elle n'avait pas envie d'en arriver là. Elle était acculée, elle avait peur pour sa vie et celle de l'enfant qu'elle portait, et elle n'avait tout simplement pas su envisager d'autre option. C'est pourquoi, après avoir rejoint le plus prudemment possible la demeure où vivait Penny pour s'assurer que personne ne la surprendrait, une besace à la main (très légère en soi, mais qui contenait malgré tout la majeure partie de ses affaires), elle avait frappé à la porte de leur maison. Penny ouvrit et ne cacha pas sa surprise en la voyant sur le pas de sa porte. Enfin non, ce ne fut pas Penny qui ouvrit, et Perséphone dût bien reconnaître se sentir assez décontenancée par le subterfuge (en tout cas très efficace) que la fée avait mis en place. C'était la première fois qu'elle la voyait utiliser ses pouvoirs, et elle devait bien reconnaître que c'était plutôt impressionnant. La vraie Penny finit par la rejoindre et Perséphone lui adressa un sourire. Elle était rassurée de se retrouver face à Penny plutôt qu'en présence d'Andrew, qui l'intimidait beaucoup plus et dont elle parvenait difficilement à oublier le statut de chasseur. Elle se disait que la jeune femme accepterait peut-être plus aisément de l'écouter.

-Ca va, répondit-elle par réflexe tout d'abord, parce que c'était ce qu'on attendait d'elle, mais elle se ravisa bien rapidement. Pas vraiment, en fait... Il y a un sorcier, il en a après moi parce que je suis enceinte. Il faut que je me cache, je savais pas où aller.

Elle se doutait que son discours devait paraître sacrément embrouillé (parce qu'il l'était), mais elle préférait donner d'un coup toutes les informations plutôt que de les disséminer au fur et à mesure. Elle espérait que, de cette manière, son interlocutrice saurait appréhender toute l'urgence de la situation et combien il était important pour elle de trouver un refuge, auprès d'eux si possible.

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erséphone adressa un sourire empli de reconnaissance à Penny quand la fée lui assura qu'elle pouvait rester ici. Penny, très clairement, était une femme admirable, et d'une générosité sans borne. Penny était la personne la plus gentille qu'elle ait jamais croisé, elle avait vraiment le coeur sur la main. Bien sûr, Perséphone l'avait su, c'était aussi pour cela qu'elle avait choisi de venir ici, ayant tout de même quelques scrupules à abuser de la générosité de la jeune femme. En même temps, elle ne pouvait pas faire autrement, c'était sa vie et celle de son futur enfant qui était en jeu, et ça, elle ne l'oubliait évidemment pas. Penny l'invita à s'installer sur son canapé, Perséphone s'exécuta tout en écoutant la fée l'interroger au sujet de ce sorcier qui voulait s'en prendre à elle. Il était normal qu'elle s'interroge. La situation était abrupte, rien ne l'avait préparée à cela, en même temps, c'était aussi tombée sur Perséphone sans qu'elle s'y attende. Et maintenant, elle vivait sous une double menace. Celle de Aaron, qui ne datait pas d'hier, et celle de Dean Appers, qu'elle n'avait pas su anticiper et dont elle souffrait profondément, à présent. La jeune femme hésita un moment. Elle ne savait pas trop ce qu'elle était en droit de dire, ce qu'elle ferait mieux de garder pour elle. Elle ne savait pas quel était le juste milieu entre les deux. Parce que si elle n'aurait pas vraiment de scrupules à parler du sorcier des grottes à Penny, qui en parlerait sans doute à Andrew, elle était aussi impliquée dans l'affaire, et Julian plus encore.

-Je sais pas grand-chose sur lui, répondit-elle, ce qui était vrai. Je sais juste qu'il vit dans les grottes, et son truc, c'est les expériences... Apparemment, il veut faire des expérimentations directement sur un foetus de sorcier.... De créature, en réalité, mais elle ne voulait pas que Penny s'inquiète pour elle-même, même si Persy ne savait pas vraiment si, justement, elle ne faisait pas prendre des risques inconsidérés à Penny en agissant comme elle le faisait, et elle ne voulait pas qu'il arrive quoi que ce soit à Penny. Tout ce que je sais, c'est qu'il en a après moi...

Et elle ne pouvait rien dire de plus. Elle ne voulait pas admettre avoir travaillé sous l'égide de ce sorcier en posant le moins de questions possibles parce qu'elle avait su, au fond, que les réponses la dérangeraient, elle ne voulait pas davantage avouer que son cousin était plus ou moins son bras droit et l'avait prévenu des plans d'Appers (même si Owen l'avait coiffé au poteau sur ce coup en réalité). Elle espérait que Penny se contenterait de ces explications.

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es mots de Penny lui allèrent droit au coeur et la rassurèrent au plus haut point. C'était exactement ce qu'elle avait besoin d'entendre à l'heure actuelle. Qu'on était là pour elle, qu'on ne laisserait pas le sorcier s'en prendre à elle et à son enfant à naître, qu'elle allait s'en sortir quoi qu'il arrive, qu'on acceptait de la prendre sous son aile. Ce n'était peut-être pas une bonne chose qu'elle soit si dépendante à l'heure où une autre vie devait dépendre de la sienne, mais pour l'heure, elle acceptait ce parti-pris égoïste. Elle se sentait soulagée que Penny accepte de l'aider (et lui garantisse l'aide de Andrew, ce qui était sans doute moins gagné, c'était même certain), tout comme elle se sentait rassurée à l'idée que Julian soit de son côté et ait voulu la protéger. Plus que jamais, elle avait besoin de soutien, et on lui en donnait. Penny avança tous les arguments que la jeune sorcière avait eu à l'esprit sans forcément le reconnaître. Forcément, en frappant à cette porte précise, elle y avait pensé, au fait que cette adresse était isolée, peu connue et donc sûre, tout comme au fait qu'elle bénéficierait de la protection d'u chasseur, ce qui n'était pas rien. Elle ne voulait pas en profiter outre mesure non plus, elle ne voulait pas abuser de la gentillesse, de la générosité, et de l'altruisme de ses hôtes, mais à situations désespérées, mesures désespérées. Et autant le dire, la situation aurait difficilement pu l'être davantage, désespérée.

-Merci beaucoup, répondit Perséphone avec, dans la voix, toute la reconnaissance du monde.

Car oui, elle l'était vraiment, reconnaissante. Si elle se tirait de ce mauvais pas, elle savait qu'elle le devrait entièrement à l'âme généreuse qu'elle avait face à elle. Léo avait vraiment bien fait de la lui présenter. Des personnes droites, honnêtes et fondamentalement bonnes, le monde n'en connaissait que trop peu, et il en avait pourtant cruellement besoin, même Perséphone n'avait plus le sentiment de faire exception à la règle, mais Penny, elle, passait entre les mailles du filet. Elle arrivait même à faire de personnes dont l'on attendrait rien des gens meilleurs, comme l'homme dont elle attendait l'enfant, et qui avait renié sa condition de chasseur pour demeurer à son bras.

-Je ne veux pas vous attirer d'ennuis, précisa-t-elle tout de même, car à ses yeux c'était on ne peut plus important. Je pourrais vous aider aussi ? Je pourrais utiliser des sortilèges de protection pour préserver cet endroit du danger.

Ce qui la protègerait aussi, mais de même pour la fée, son compagnon et leur futur enfant. Encore fallait-il qu'un Hellsing accepte qu'on se serve de la magie dans son propre foyer. Ce n'était sans doute pas gagné.

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erséphone hocha la tête en réponse à la question de Penny. Est-ce qu'elle pouvait vraiment faire cela ? Rien ne le garantissait, car c'était un exercice auquel elle ne s'était jamais essayée avant ce jour, et protéger intégralement, en évitant qu'il y ait la moindre faille, une maison de la taille de celle de Penny et Andrew, ce ne serait pas du gâteau, mais elle s'en sentait capable. En ce qui concernait ses talents magiques, elle avait pris du galon mais aussi et surtout de l'assurance, une assurance telle qu'elle se sentait capable de soulever des montagnes... pas les montagnes qui cerclaient notre terre, malheureusement, mais en tout cas, elle savait qu'elle pouvait se rendre utile, qu'elle en avait le pouvoir. Cela lui demanderait sûrement un peu de temps et plus encore d'énergie, mais elle se promettait d'y parvenir, et de rajouter encore plus de protection autour de la chambre de la petite. Quand elle voyait Penny s'enthousiasmer de cette perspective, qui plus est, elle concevait encore moins la possibilité d'échouer. Non, il ne fallait pas qu'elle échoue, il était indispensable qu'elle s'en sorte et qu'elle réussisse, par tous les moyens possibles. Alors elle allait mettre les bouchées doubles. Se concentrer sur de nouveaux objectifs lui faisait du bien, et vu la tournure qu'était en train de prendre sa situation, c'était très clairement bénéfique pour elle que de pouvoir concrètement se focaliser sur ce genre de chose, que de pouvoir se rendre utile. D'autant que quitte à abuser de l'hospitalité du couple, autant les remercier à sa manière, quand même. Même si l'un des deux ne devrait pas savoir ce qu'elle ferait pour eux.

-Je dirai rien, je me doute que ce serait pas une très bonne idée, répondit-elle dans un fin sourire.

Certes, Andrew Hellsing était la preuve que les membres de cette famille de chasseur n'étaient pas tous des cas desespérés (encore que Perséphone ne se faisait vraiment aucune illusion concernant le petit frère), mais pour autant, elle comprenait bien qu'il ne fallait pas trop lui en demander non plus. Il vivait en couple avec une fée, il s'apprêtait à devenir le père d'une fée... c'était énorme, déjà, et Persy aurait cru ça improbable il n'y a pas si longtemps. Mais alors, envisager qu'il tolère qu'il soit fait usage de la magie sous son toit... elle n'osait imaginer sa réaction. Non, de toute manière, sa magie, elle comptait bien en faire usage à l'écart de cette demeure, elle ne savait que trop les conséquences éventuelles, ne serait-ce que le risque de se faire repérer, et puis, elle comptait bien poursuivre son initiation avec son cousin malgré tout.

-Et si je peux faire quoi que ce soit d'autre...

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rendre soin d'elle... Ca devrait sans doute être la moindre des choses, en effet. Parce que la jeune femme était enceinte, menacée, isolée et que dans de telles circonstances, pour son propre bien, il faudrait sans doute qu'elle accepte de se montrer un minimum égoïste et de renoncer à vouloir sans arrêt veiller à l'intérêt des autres avant de songer au sien. Seulement, elle se sentait si redevable envers Penny, à l'heure actuelle, du cadeau qu'elle lui faisait en acceptant de lui ouvrir les portes de sa maison en dépit du danger que cela pourrait potentiellement représenter pour elle ainsi que pour son compagnon, qu'elle ne se voyait définitivement pas faire montre de cette ingratitude qui voudrait qu'elle se contente d'accepter les cadeaux providentiels qui lui étaient faits sans rien prendre en retour. Penny lui disait qu'elle était la bienvenue ici, et elle avait vraiment le sentiment que c'était le cas. Peut-être que Andrew Hellsing, lui, de son côté, ne l'entendrait pas réellement de cette oreille, mais en attendant, c'était un vrai soulagement que de pouvoir se sentir accueillie à bras ouvert. Elle avait eu plus que jamais besoin du soutien de ses proches, et ce dernier lui avait manqué considérablement dans les premiers temps de sa grossesse. Contre toute attente, c'était Julian qui, pour commencer, lui en avait apporté le plus. Maintenant, en plus de son cousin, elle avait retrouvé Léo, ce frère de coeur qui lui avait tant manqué, et maintenant, elle avait Penny. Dans son malheur, elle était tout de même chanceuse. Alors forcément, elle avait envie d'en faire profiter les autres aussi. Mais elle devrait sans doute ralentir le rythme, ça elle pouvait tout de même l'admettre, effectivement.

-Tu as sûrement raison, admit Perséphone dans un fin sourire. Mais quand je ne fais rien, quand j'accepte de prendre un peu soin de moi, je me sens un peu coupable... Et puis... j'aime bien me concentrer sur autre chose, ça m'évite de trop cogiter.

Ce n'était pas pour rien qu'elle s'était montrée si attentive et scrupuleuse vis-à-vis de Julian tandis que ce dernier l'entraînait dans les grottes (lieux de mille et un crimes auxquels elle ne pouvait que prétendre être aveugle, surtout depuis sa conversation avec Owen) et l'encourageait à peaufiner ses expériences, à augmenter ses capacités magiques. Tant qu'elle se focalisait sur la sorcellerie, et uniquement sur la sorcellerie, elle parvenait à oublier un peu Edward, sa trahison, le fait qu'il lui manquait encore aujourd'hui malgré tout ce qu'il lui avait fait, de même que sa peur vive et tenace : celle d'être une mauvaise mère, celle de ne pas être à la hauteur. Prendre soin de soi, c'était ça aussi, être attentif à ses pensées et à ses angoisses. Et elles n'étaient pas toutes bien glorieuses.

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erséphone esquissa un sourire, au fond soulagé que Penny comprenne ce qu'elle traversait. Elle n'ignorait rien de la situation qu'il lui fallait traverser, et donc elle était à même de compatir. Penny était une personne empathique, c'était évident, et ça faisait du bien à la jeune femme de se sentir... entendue, écoutée, et de savoir qu'une personne au moins se souciait de son sort. D'accord, ça ne voulait pas dire pour autant que la situation n'allait pas continuer de lui échapper à l'avenir, mais au moins, il y avait une personne dans toute notre terre, qui comprenait ce qu'elle traversait. Enfin deux, sans doute, parce qu'elle pouvait sans doute compter Léo à ce compte (encore qu'ils ne se comprenaient pas toujours alors même que leurs histoires étaient pourtant similaires). En tout cas, ça la rassurait un peu, et elle se disait définitivement qu'elle avait frappé à la bonne porte. Malgré tout, et même si Penny était de bon conseil, elle était incapable de l'écouter, parce que sa culpabilité n'était pas quelque chose qu'elle contrôlait. Elle n'y pouvait rien, c'était plus fort qu'elle, ça la gagnait sans qu'elle le contrôle, sans qu'elle sache le raisonner ou le comprendre. Et vu les circonstances, il faudrait sans doute beaucoup de temps encore avant qu'elle ne parvienne à faire abstraction une bonne fois pour toutes des émotions qui la submergeaient constamment. Peut-être qu'avec le temps, elle arriverait à se dominer, mais elle en était encore loin, très loin. Elle allait avoir besoin de temps, et de la patience de ses proches. Et là, manifestement, elle avait l'un et l'autre, grâce à Penny.

-Je sais que tu as raison, sourit-elle doucement. Parce que c'était la vérité. Et en effet, un stress comme celui qu'elle ressentait, conjugué à une activité trop importante, ne serait pas pour faire du bien à son bébé. Il fallait vraiment qu'elle se contrôle, qu'elle prenne sur elle, et qu'elle accepte de se détendre un minimum, il en allait bien évidemment de la santé de son bébé et de son bien-être à elle aussi, parce qu'il était vraiment grand temps qu'elle s'occupe d'elle, puisque s'occuper d'elle, c'était aussi prendre soin de son enfant à naître. C'est difficile mais je vais essayer. Même si elle ne pouvait bien évidemment rien promettre. Parce que ce serait mentir que de faire cette promesse alors qu'elle n'était vraiment pas sûre d'en être capable, qu'importe les efforts qu'elle fournirait pour cela. Où est-ce que je peux... m'installer, du coup ?

Elle avait bien conscience de s'imposer, et elle ne voulait pas en rajouter, mais elle se disait que si elle savait où poser ses affaires. Elle pourrait s'y poser, s'y faire toute petite et s'y faire oublier. Sauf quand on aurait besoin d'elle, bien sûr.

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