L’angoisse est le vertige de la liberté. (Jane <3333)

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lle avait encore mal… La douleur ne saurait disparaître si facilement… C’est qu’elle n’était pas que physique, elle était aussi psychologique, surtout psychologique, et il leur faudrait sans doute un temps infiniment long pour se remettre pour de bon des souffrances qu’ils avaient endurées, des traumatismes infligés. Jane avait connu la douleur de l’enfermement, déjà, pourtant, quand elle avait été la victime des Hellsing, mais c’était sans rapport. L’absence d’Edward lui pesait, alors, certes, mais elle n’avait pas à subir ce supplice constant, celui de le voir avoir mal, celui de le voir se torturer comme jamais… Elle avait eu plus mal pour son âme sœur que pour elle-même, au cours de cette épreuve, et pourtant, on ne pouvait vraiment pas dire qu’elle ait été ménagée de son côté, bien au contraire, même. Sa souffrance avait été vive et réelle… C’était des choses desquelles on ne pouvait pas se remettre facilement. Certes, leur passage par la case « guérisseur » leur avait déjà fait du bien, de même que de pouvoir vraiment se laver pour la première fois depuis une éternité, même si l’eau chaude au-dessus d’une plaie n’est pas toujours agréable, tout comme encore le fait de pouvoir manger leur premier vrai repas depuis une éternité, ou encore le fait de pouvoir s’endormir dans un vrai lit… mais ça ne les sauvait pas de tout.

Jane avait encore certaines choses en travers de la gorge, même si elle savait que c’était en soi insignifiant et qu’elle ne devrait pas y accorder tant d’importance. Elle était heureuse et soulagée d’être enfin libre, de pouvoir croire en l’avenir, de se dire que leurs rêves d’avenir n’étaient en définitive pas compromis par les circonstances, c’était agréable, oui, mais ça ne la soulageait pas de tout. Edward et lui avaient sans doute beaucoup de choses à se dire, mais clairement pas l’énergie pour cela. Jane n’avait su faire qu’une chose : s’étaler dans son lit et s’endormir comme une masse. Elle n’eut pas du tout conscience de s’être endormie. Pour la première fois depuis bien longtemps, Morphée l’avait accueillie entre ses bras avec une facilité des plus déconcertantes, il faut bien le dire… Mais tant mieux, non.

Ce fut l’agitation d’Edward qui, au beau milieu de la nuit, la réveillèrent. L’esprit embrumé, elle n’y prêta pas garde tout de suite, jusqu’à ce que l’absence de sa chaleur à côté d’elle devienne moins supportable. Elle ignorait ce qu’il était allé faire, mais avait supposé qu’il avait seulement voulu se servir à boire ou quelque chose de cet acabit. Mais non, quand elle se décida à se redresser, elle fut surprise de retrouver le jeune homme au pied de leur lit, assis à même le sol, le regard dans le vide. Elle sentit son regard se serrer en le voyant ainsi. Edward était en morceaux. Il faudrait beaucoup de patience pour parvenir à tous les rassembler.

-Ed ? Elle s’approcha doucement de lui et posa ses mains sur ses épaules, déposa un baiser au creux de son cou. Ça va ?

La réponse était évidente, mais elle donnait la liberté au jeune homme de ne pas répondre s’il ne le voulait pas.

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e lit était trop mou... cette remarque pourrait prêter à sourire si elle ne découlait pas d'une situation trop dramatique pour en plaisanter, et Jane n'était malheureusement que trop bien placée pour le savoir. Ils avaient passé des jours et des jours à dormir à même un sol de pierre, dans le froid et l'humidité, tenaillés par la faim, la douleur, l'angoisse... Passer de rien à tout était une épreuve plus difficile qu'on ne peut l'imaginer. Jane, pourtant, avait l'air de mieux le vivre que lui... En même temps, des deux, Edward était celui qui en avait le plus subi. Et puis... Jane était déjà passée par là, quand les Hellsing l'avaient gardé dans leur cave plusieurs semaines durant. Elle était passée par les mêmes stades que le jeune homme, à ce moment-là, à la différence qu'elle n'était pas chez elle, et qu'elle n'avait pas encore (en tout cas pas à chaque fois) la présence réconfortante d'Edward pour la rassurer et la réchauffer. Ce ne serait pas forcément suffisant, mais elle voulait espérer que ça le soulagerait. Il allait mal, comme elle ne l'avait jamais vu mal, et elle se devait de tout mettre en oeuvre pour l'aider à aller mieux. Elle ressentait sa douleur au plus profond de son être, et quand bien même elle n'était pas non plus épargnée par un tenace sentiment d'angoisse, elle savait que ce n'était rien en comparaison de ce qu'il supportait. Alors, il fallait qu'elle soit forte pour deux... elle espérait que ce serait assez, en tout cas, sans en avoir l'assurance. Elle se sentait impuissante, elle avait peur de ne pas suffire à dissiper sa douleur... Elle se redressa, le tout pour venir s'asseoir à même le sol, juste à côté de lui.

-Qu'est-ce que tu as envie de faire, alors ? demanda-t-elle avec douceur en serrant sa main dans la sienne.

Le voir dans cet état la rendait malade. Elle aimerait être capable d'interpréter totalement les sentiments qui traversaient son âme soeur et qu'elle ressentait à son tour de son côté, mais c'était diffus, confus... elle se doutait qu'Edward lui-même ne savait pas vraiment décrire ce qu'il ressentait, ces émotions subies bien plus qu'éprouvées. Le mal était indissible, il était difficile d'en trouver la résolution, mais elle voulait faire cet effort, parce qu'elle ne supportait pas de voir l'homme qu'elle aimait dans cet état. Et puis, elle se sentait complètement inutile. elle voyait bien que sa présence n'était qu'un pansement très relatif à sa douleur, mais clairement insuffisant malgré tout. Elle avait envie de le sauver sans savoir précisément de quoi, d'un traumatisme que seul le temps pouvait sans doute aider à dépasser... ou pas ? Elle n'en savait fichtre rien, en vérité.

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u fond, Jane n'avait pas besoin de poser la question pour en connaître la réponse, elle la connaissait déjà. S'il pouvait y avoir quelque chose de spécifique qui sache le soulager, un remède miracle à son mal-être, elle le lui apporterait directement, mais il n'y en avait pas. Il était brisé, il était perdu... Alors, forcément, il ne savait pas, bien sûr qu'il ne savait pas. Jane était d'ordinaire plutôt douée pour déterminer les désirs du jeune homme (elle trichait un peu, grâce à ses pouvoirs, il faut dire), mais là, elle était perdue, parce qu'il l'était lui aussi. Au final, la seule chose qui semblait capable de lui communiquer un minimum de réconfort, c'était la douceur de leur contact, la présence l'un de l'autre, ce réconfort qui avait déjà été leur unique source de douceur le temps qu'ils avaient passé dans les grottes. Mais même si Edward en profitait au maximum, et elle aussi, elle ressentait bien que ce n'était pas suffisant. Voilà, là se situait le problème. Il manquait quelque chose. Ils avaient toujours su se sentir complets en étant simplement ensemble, mais pour cette fois, elle voyait bien qu'il faudrait autre chose, un quelque chose qui leur échappait totalement en dépit de leurs efforts. En même temps, c'était très certainement en demander trop trop rapidement que d'espérer que la vie allait reprendre son cours après ce qui leur était arrivé. Ils avaient subi, ils avaient souffert. Il était normal, maintenant, qu'ils en fassent les frais. Ils n'avaient pas le choix, ils devaient patienter... mais Jane n'avait jamais été patiente, et elle se voyait moins patiente encore quand le bonheur de son âme soeur était en jeu.

Elle donnerait tout pour le voir ne serait-ce que lui sourire, mais ce désir si simple lui-même paraissait tout à fait hors de portée. Pendant plusieurs longues secondes, elle ne dit rien, elle se contenta de laisser à son époux le soin de puiser du réconfort où ils le pouvaient. Puis après un moment, elle se redressa, non sans avoir au préalable déposé un baiser sur la joue d'Edward comme pour le rassurer alors que le froid allait les saisir temporairement. Elle se releva, récupéra son briquet sur sa table de nuit. Elle fit alors voler une constellation de petites boules de feu au-dessus de leurs têtes, comme autant d'étoiles qui éclairèrent une pièce trop sombre (pour cause, il faisait encore nuit). Ils avaient passé trop de temps dans le noir, il n'en était pas question. Elle s'accroupit ensuite face à Edward, risqua un léger sourire, qui eut tout de même peine à émerger sur ses lèvres... comme si une telle situation pouvait prêter à sourire.

-Qu'est-ce que tu dirais d'un petit-déjeuner aux chandelles ? proposa-t-elle, faute d'idée plus transcendante que celle-ci.

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J

ane n'avait pas la moindre idée de l'heure qu'il était, ce dont elle était certaine, en revanche, c'est qu'il n'était absolument pas l'heure de prendre le petit-déjeuner, mais ça lui était complètement égal, sincèrement égal, elle voulait juste leur changer les idées, leur offrir de profiter de tout ce qui avait été hors de leur portée pendant si longtemps. Puisque dormir semblait exclu pour le moment, alors autant profiter du reste : de la lumière, de la nourriture à foison, personne pour les observer à distance, de l'autre côté de barreaux qui n'existaient pas... Elle n'avait pas forcément faim, mais un bon petit festin se laissait toujours savourer après tant de semaines de privation. C'est vrai qu'ils s'étaient déjà bien rattrapés la veille au soir (dans la mesure du possible, elle avait le sentiment que leurs estomacs respectifs avaient singulièrement rétréci au terme d'une telle épreuve), mais ils pouvaient bien en rajouter encore un peu, après tout. Edward acceptait sa proposition, c'était tout ce qui importait à ses yeux. N'importe quoi pourvu qu'il se sente bien, c'était absolument tout ce qu'elle désirait. La jeune femme allait se redresser le temps de leur apporter de quoi manger, mais Edward la retint un instant. Les mains posées sur ses épaules, le regard plongé dans le sien, il lui fit bien comprendre que si elle avait besoin de retourner se coucher, il ne fallait pas qu'elle s'en prive pour lui.

-Je suis pas fatiguée, répliqua-t-elle.

Elle fut bien tentée d'ajouter un "C'est de ta faute, ça", mais elle ne se sentait pas d'humeur à le chambrer. L'incapacité d'Edward à dormir n'arrangeait pas son sommeil, c'est vrai, mais à vrai dire, si elle était repartie se coucher, elle aurait quand même trouvé une petite place entre les bras de Morphée. Elle était fatiguée, et elle avait en vérité bien envie de dormir encore un peu, mais c'était inenvisageable pour elle de retourner l'air de rien au lit en laissant Edward dans cet état. Non, elle devait être là pour lui, et donc elle serait là pour lui, ça ne discutait pas, c'était comme ça, elle pouvait bien envoyer paître la fatigue si cela pouvait apporter un minimum de réconfort à son âme soeur. et elle comprenait bien qu'il en avait grand besoin. Elle déposa un baiser sur les lèvres du jeune homme.

-Laisse-moi prendre soin de toi, d'accord ?

Et sans attendre son avis, elle s'éclipsa le temps de leur préparer un plateau avec tout ce qu'elle avait trouvé d'appétissant à dévorer et à boire chez eux. Sucré, salé, peu importe, le terme "petit-déjeuner" était de toute manière inapproprié dès le départ. Elle revint, déposa précautionneusement le plateau entre eux. Lui qui la chambrait parfois sur le fait qu'il voudrait qu'elle soit à ses petits soins, il était exaucé. Mais il n'avait pas dû espérer de telles circonstances.

-Et voilà !

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ane esquissa un fin sourire. Elle appréciait qu'Edward la qualifie de "parfaite", bien qu'elle était loin de penser, de son côté, qu'elle l'était bel et bien, elle possédait tant de défauts que parvenir à tous les énumérer tiendrait de l'exploit, mais elle avait envie de croire que toute imparfaite qu'elle était, elle était parfaite pour lui, comme il était parfait pour elle en dépit de toutes ses imperfections. Dans tous les cas, elle n'allait certainement pas se plaindre d'un tel compliment sachant qu'en d'autres circonstances, si elle lui avait ainsi apporté le petit déjeuner au lit, il aurait sans doute fait une réflexion bien moins élégante qui lui aurait rapidement passé l'envie de recommencer. Elle aimait Edward, et prendre soin de lui était finalement naturel pour elle, mais ce n'est pas pour autant qu'elle voulait acquérir le statut de larbin de monsieur. Elle ne pensait pas que ce soit valorisant, ni pour elle, ni pour lui. Donc oui, aucune sale réplique à l'horizon, et c'était très bien comme ça, il valait mieux pour eux. Elle se servit à boire quand son époux affirma qu'il ne saurait pas ce qu'il ferait sans elle. Et elle, qu'est-ce qu'elle ferait sans lui ? En de telles circonstances, elle n'en savait rien. Ou si, elle savait, elle n'aurait pas survécu. Ce qui l'avait fait tenir, ce qui faisait qu'elle était là, face à lui, c'était sa présence, son besoin de le protéger, la force de ses sentiments. Sans tout ça, elle n'aurait pas insisté, elle aurait laissé tomber, tout simplement. Elle n'aimait pas devoir le reconnaître, mais il est évident que ça aurait été le cas. Mais en même temps...

-Sans moi, tu n'aurais pas eu à subir tout ça, dit-elle alors dans un fin sourire.

Et dans une certaine mesure, elle pensait dire vrai. C'était peut-être chercher un peu loin, mais elle le pensait. Leurs problèmes venaient soit de leur relation que d'autres n'approuvaient pas (et là, les choses n'y avaient pas dérogé, puisque c'était Léo qui les avait dénoncés... quand Enjolras les avait sauvés..; bon), soit de la nature même de sa relation, puisque les myrihandes étaient des créatures rares et donc convoitées, par les chasseurs aux trophées répugnants comme aux sorciers adeptes d'expérimentations scientifiques à vomir. Alors sans elle, c'est clair qu'il serait plus heureux, il n'aurait pas à se demander comment il se tirerait de cette situation, il ne vivrait pas cette situation du tout. Mais la vie en avait décidé autrement, et Jane aimait trop Edward pour le laisser tomber sous le prétexte qu'elle était un poison pour elle. Ce qui était vrai.

-Je me rattrape du mieux que je peux, c'est tout.

Et elle se disait que ce n'était pas assez. Comment l'apaiser pour de bon ? Elle n'en avait pas la moindre idée.

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dward n'avait pas tort, au fond. Sa vie sans lui serait bien différente. Il était très probable qu'elle se serait effectivement mariée, avec Léo sans doute, et pour de vrai.. Seulement, elle n'était plus capable de considérer le jeune homme comme quelqu'un de bien sous tout rapport. Certes, il avait été un ange de douceur, de gentillesse et de patience avec elle et elle savait pertinemment qu'il l'avait profondément aimée, mais ça ne changeait rien au fait qu'il les avait livrés à la torture sans sourciller. On récolte ce que l'on sème, dit-on, donc ils étaient peut-être responsable de son attitude, mais Jane commençait à se demander s'il n'y avait pas chez le jeune homme un fond plus obscur qu'elle n'avait jamais vu avant cela... et que Léo devait prendre grand soin de dissimuler derrière ses bonnes manière de gendre idéal qui avait réussi à séduire sa génitrice avant qu'elle ne comprenne qu'elle serait obligée de se payer un gendre beaucoup plus "mauvais garçon". Quelle importance de toute façon ? Aucune, pas la moindre, elle aurait peut-être su se convaincre qu'elle était heureuse en ménage, mais elle ne l'aurait pas été vraiment, ça elle en était totalement convaincue. Elle n'aurait pu éprouver l'amour qu'elle ressentait pour son âme soeur pour personne, et elle n'avait même pas envie que cette idée l'effleure. Oui, en conséquence, leurs vies étaient agitées et ils ne se laissaient pas beaucoup de répit, mais ils s'aimaient malgré tout, et ça, la force de ces sentiments, méritait au final d'essuyer toutes les tempêtes, pour le seul bonheur d'être ensemble, ça et rien d'autre. C'était lui qui était le mari parfait pour elle, lui et personne d'autre.

-D'accord, d'accord, dit-elle dans un fin sourire comme si elle avait eu besoin d'être convaincue quand bien même il était évident qu'elle l'était déjà. Je n'irai pas voir ailleurs, alors.

Evidemment, qu'elle n'irait pas voir ailleurs. Elle était juste soulagée d'entendre son interlocuteur parvenir à plaisanter, même un peu. Elle aurait comprit que cela lui soit plus difficile, qu'il n'y parvienne tout simplement pas à l'heure actuelle. Elle était rassurée que son esprit soit resté le même et elle aimait penser qu'elle parvenait véritablement à lui changer les idées à l'heure actuelle, lui qui en avait tant besoin... et il n'était pas le seul. A elle aussi, ça lui faisait du bien. C'est vrai qu'elle était crevée, mais elle n'échangerait pas du temps de sommeil complémentaire contre cet instant de complicité, la preuve à ses yeux qu'ils allaient se remettre et s'en sortir.

-Je ne vais nulle part. Elle afficha un nouveau sourire. De toute façon, j'ai pas les moyens.

La meilleure méthode restait encore de dédramatiser, non ?

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ane ne faisait que plaisanter, bien sûr, quand elle affirmait qu'elle restait avec lui pour les moyens financiers d'Edward. Clairement, ce n'était pas la fortune des Baker qui avait tout d'abord attiré Jane chez son âme soeur. Non pas qu'il ne soit pas agréable de pouvoir avoir un niveau de vie élevé sans trop se faire de soucis, mais c'était une des choses qui l'avait exaspérée pour commencer, son côté riche qui se la pète... alors qu'elle et sa mère peinaient à finir leurs fins de mois. Maintenant, elle avait appris à aimer les défauts les plus exaspérants chez lui, alors ça changeait tout. Pour ce qui était de son corps de rêve dont il aimait tant se vanter (à sa grande exaspération), il est vrai qu'elle ne le laissait jamais insensible. Ceci dit, elle se fichait bien de ce à quoi il pouvait bien ressembler à présent. En dépit du fait qu'il était encore très attirant malgré tous les sévices subis, elle chérissait chacune de ses cicatrices parce qu'elle le chérissait lui, tout simplement. Jane l'aimait au point qu'un simple sourire de sa part parvenait à lui emballer le coeur, simplement parce qu'elle le savait un peu heureux... pas totalement, parce qu'il avait trop souffert, mais suffisamment pour qu'elle se dise que sa présence lui servait à quelque chose. Ils parvenaient à plaisanter un peu, et elle devait bien dire que ça la soulageait.

-Encore heureux, il me faut au moins ça pour réussir à te supporter, répliqua-t-elle. Ce qui voulait dire tout autre chose. A savoir que même fauché comme les blés et défiguré, elle n'aimerait jamais que lui, parce qu'il était son tout, celui qui la complétait mieux que personne. L'homme de sa vie, pour qui elle était prête à tout. Tu sais, je déconne pas quand je te dis que je te trouve tous les jours un peu plus beau. Elle marqua une légère pause. Tes cicatrices, c'est la preuve de tout ce que tu es capable d'endurer pour moi, pour nous. Alors je les trouve belles.

Elle ne serait jamais objective à ce sujet, parce que de toute façon, dès qu'il était question d'Edward Baker, c'était son coeur qui s'exprimait plus qu'aucun de ses autres sens, ça changeait bien évidemment tout. Il révélait le meilleur en elle... Et le pire aussi, bien sûr, celui qu'elle taisait pour le moment, par exemple, et qui avait fait naître les tensions qui avaient accompagné leur retour au bercail. Ils n'avaient pas eu le temps d'en discuter, tout s'était enchaîné trop vite. Et à présent, elle ne se voyait pas aborder le sujet à présent. Il allait trop mal pour qu'elle en rajoute. Alors elle se contentait de lui prouver de mille manières qu'il tenait à elle, voilà tout.

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ane sentait que cette conversation faisait du bien à son âme soeur, et c'était au fond tout ce qui comptait pour elle. Elle avait besoin de le rendre heureux, ou en tout cas un peu plus heureux qu'il ne savait l'être au vu des choses éprouvantes qu'ils avaient endurées, pour pouvoir être heureuse elle aussi. Et ça n'avait pas seulement à voir avec le fait que leurs émotions étaient totalement partagées. Oui, c'est vrai, la douleur d'Edward devenait instantanément sa douleur, la joie du jeune homme sa joie, mais en l'occurrence, même s'ils ne devaient pas être ainsi liés par leurs conditions de myrihandes, ça ne changerait rien au fait qu'elle ait besoin de le voir sourire pour sourire à son tour. Dans tous les cas, pouvoir retrouver leurs vieilles habitudes, leurs taquineries, leurs discussions simples et légères, c'était déjà une première étape. Il faudrait plus de temps que cela pour effacer le traumatisme, bien sûr, mais s'ils s'en donnaient les moyens (et puisqu'ils s'en donnaient les moyens, ils y parviendraient quoi qu'il en soit et ils pourraient reprendre où on les avait forcés à s'arrêter. Leur vie était ainsi faite, à chaque fois que le plus parfait bonheur venait les effleurait du bout des doigts, une catastrophe venait tout gâcher. Mais Jane arrivait à demeurer confiante malgré tout. Parce qu'ils surmontaient tout, ils triomphaient de tout, ils étaient toujours plus forts que tous les obstacles que l'on voulait placer sur leurs chemins, c'était cela qui comptait.

-C'est clair, faut être bon à interner, répliqua-t-elle quand Edward fit remarquer qu'il fallait avoir un grain pour l'aimer. Ce n'est pas comme si ce propos risquait de la blesser, puisque c'était la vérité (bon, parfois la vérité en elle-même peut être blessante, mais là ce n'était pas le cas), elle était forcément cinglée... et surtout masochiste, pour adorer autant Edward alors que clairement, tout, la raison en premier, devrait davantage la pousser à le fuir qu'à se laisser faiblement tomber dans ses bras. Mais elle s'en foutait, parce que cet amour était et resterait ce qu'elle avait vécu de plus fort, de plus intense et de plus nécessaire dans toute son existence, alors quels regrets pourrait-elle avoir ? Et visiblement, je suis pas la seule dans ce cas..., ne sut-elle s'empêcher de lâcher ensuite, irrésistiblement, tout en le regrettant in extremis.

Elle n'était pas la seule à être cinglée, ça c'était certain, surtout en notre terre où, au final, à bien y regarder, tout le monde était un peu fou (il n'y en avait pas un pour récupérer l'autre), mais surtout, elle n'était pas la seule à aimer Edward à ce point. Ce qu'elle n'avait que trop pu comprendre quand Perséphone était venue à leur rescousse.

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ane savait très bien qu'il fallait qu'ils aient une conversation au sujet de Perséphone. Ce ne serait pas une conversation agréable, et au vu de leurs fichus caractères respectifs, il y avait de fortes chances pour que ça parte très rapidement en vrille, mais en même temps, ils étaient bien placés pour savoir que ce n'était pas une bonne chose que de garder les choses pour ça, qu'il valait mieux en discuter tout de suite pou éviter que le conflit ne s'intensifie sous l'effet du non-dit. Oui, cette conversation était une étape obligatoire, mais Jane l'avait retardée malgré tout. Il faut dire qu'à leur retour des grottes, tout s'était enchaîné très vite, et leur priorité avait été de se soigner bien plus que de se prendre inutilement la tête. Elle n'était toujours pas sûre que ce soit une bonne idée maintenant, parce que la jeune femme était très fatiguée et qu'elle voyait et sentait bien que son âme soeur n'était pas du tout au meilleur de sa force. Alors c'est sûr, évoquer Perséphone n'était pas forcément le bon moment, mais voilà, c'était dit, elle l'avait fait, et puisque le sujet était lancé, elle ne pouvait plus faire marche arrière, ce n'était pas possible. D'ailleurs, Edward l'invitait à présent à dire ce qu'elle avait sur le coeur, et l'air de rien, ce n'était pas simple de savoir par quoi commencer.

-C'est ce que je fais, répliqua-t-elle, légèrement sur la défensive, en réponse à la question d'Edward, même s'il était évident qu'elle aurait sans doute tourné autour du pot si on ne l'avai pas encouragée à développer son propos. Je vais passer pour une garce parce qu'elle nous a sauvé la vie, mais j'ai pas aimé la manière dont tu m'as traitée, là-bas. En même temps, il le savait, il l'avait forcément ressenti. J'ai eu le sentiment d'être une pauvre petite conne dont l'opinion n'avait aucune importance. Et à côté, elle était là, avec son ventre énorme et ses principes de bon samaritain, et j'ai encore plus eu le sentiment d'être une merde. Et j'avais l'impression que t'avais d'yeux que pour elle.

D'accord, quand elle s'y mettait, les mots ne lui manquaient pas, finalement. Même si elle se sentait débile à chaque mot qu'elle prononçait tant sa jalousie crevait les yeux, et Edward qui avait déjà tant apprécié par le passé la savoir jalouse, elle craignait un peu qu'il en tire parti plutôt que d'accepter de se mettre à sa place. Elle avait tort de tenir tant de rancoeur à celle qui les avait sauvés, surtout qu'elle savait bien que son âme soeur ne ressentait rien pour elle, ou en tout cas rien qui se rapproche de ses sentiments pour elle, mais ça avait été impossible pour elle de ne pas se sentir humiliée.

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ane n'aimait pas spécialement avoir cette conversation, parce que le sujet abordé était délicat et forcément clivant d'une part, et parce qu'elle était obligée de mettre sa faiblesse à nue d'autre part. Car définitivement, rien ne pouvait justifier sa colère autrement que ses sentiments confus, sa jalousie irrépressible, et tout ça ne brossait bien évidemment pas d'elle le portrait le plus flatteur qui soit. Pour autant, c'était une bonne chose qu'ils en parlent maintenant et n'attendent pas davantage. Par ailleurs, Edward avait la délicatesse de ne pas se foutre de sa gueule ou encore de se braquer, et de fait, ça lui faisait réellement du bien. Elle avait besoin qu'il écoute ce qu'elle avait à lui dire et qu'il ne tienne pas ses propos pour absurdes ou inutiles mais reconnaisse qu'ils puisaient au coeur d'une réelle souffrance qu'elle ne parvenait tout simplement pas à taire ou à éluder en dépit de tous ses efforts. La réponse du jeune homme, en ce sens, la soulagea un peu. Il revint sur les événement, assurant que la seule chose qui comptait pour lui alors, c'était qu'ils s'en sortent indemnes, qu'ils quittent ces grottes au plus vite, elle pouvait le comprendre, mais malgré tout, son incapacité à tenir compte de ses réticences en situation de crise l'avait tout de même refroidie. D'accord, honnêtement, elle savait bien que la jalousie était ce qui l'avait rendue si défiante, mais elle aurait tout de même pu avoir raison d'être sur ses gardes. Quelqu'un aurait pu prendre l'apparence de Perséphone, cette dernière aurait pu être envoutée ou va savoir quoi encore. Il avait pris une décision cruciale pour eux deux, et il ne lui avait pas laissé le choix. Certes, au bout du compte, ça avait porté ses fruits. Mais comment auraient-ils pu savoir ? Bref, c'était passé quoi qu'il en soit... et Edward prenait la peine de s'excuser. Elle ne s'était pas attendue à ce qu'il le fasse si facilement et l'en remerciait intérieurement. Elle avait un peu moins le sentiment d'agir en cinglée.

-Mouais, ça ça reste à prouver, répliqua-t-elle quand Edward lui affirma qu'elle n'était pas une merde. Elle ne voulait pas en être une, mais c'était quand même une sensation tenace, en elle, l'impression de ne pas être à la hauteur... pour lui et vis-à-vis d'elle. Elle hésita avant de reprendre la parole, elle ne voulait pas inquiéter ou braquer Edward, c'est juste qu'elle ne voulait pas non plus passer à côté de l'évidence. Tu l'aimes toujours, hein ?

Pas comme il l'aimait elle, ce n'était pas la question, elle était convaincue qu'il ressentait pour elle ce qu'elle ressentait pour lui et qu'Enjolras ne pouvait pas rivaliser. Mais c'était difficile de lui présumer encore tant d'affection pour son ex.

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ane savait qu'elle devrait sans doute en rester là, accepter et apprécier les excuses d'Edward (parce que l'air de rien, le fait qu'il lui demande pardon, ce n'était vraiment pas rien, et ça méritait d'être signalé) pour ce qu'elles étaient, à savoir une déclaration sincère, qui lui venait du fond du coeur, mais le fait est qu'elle n'y arrivait pas. C'était plus fort qu'elle, Jane était en proie au doute. Quand il était question de Perséphone, c'était constamment le cas, et ça ne cesserait jamais de l'être, parce que les faits étaient là. Perséphone incarnait tout ce que Jane ne serait jamais mais savait attirer, d'une certaine manière, Edward. Certes, elle l'aimait plus que tout au monde, et elle avait vraiment envie de croire que lui aussi, et que Perséphone, en ce sens, ne lui arrivait pas à la cheville. Elle était convaincue, par exemple, que Edward ne la quitterait jamais pour Perséphone ou autre absurdité du genre. Ca, elle en était sûre, mais ça n'ôtait rien au fait qu'il lui était difficile de le voir accorder ce genre d'affection à quelqu'un d'autre. Parce que ce n'est pas le genre d'affection que l'on adresse à une amie. C'est différent, c'est autre chose. Plus... blessant. Plus douloureux à encaisser. Edward n'y était pour rien, il n'allait pas se forcer à détester Perséphone pour lui faire plaisir, tout comme elle n'arriverait pas à se forcer à détester Léo... la différence étant seulement à ce titre qu'elle ne pensait pas avoir un jour éprouvé le genre d'amour pour Léo qu'Edward avait éprouvé pour Perséphone. Léo était son échapattoire, un moyen de se voiler la face, un homme pour qui elle avait éprouvé une profonde tendresse mais pas d'amour. Alors que de l'amour, oui, Jane était convaincue qu'Edward en avait eu pour Perséphone, et en avait toujours. Il y a tant de formes d'amour différentes.

-C'est con mais j'aurais aimé qu'elle te donne de bonnes raisons de la détester, tu vois. J'aurais voulu que tu la haïsses... mais elle est tellement... parfaite. Elle poussa un soupir. Je sais que c'est moi que tu aimes. Elle avait mis du temps à l'intégrer complètement, mais c'était fait, elle n'avait plus de doute, là-dessus. Mais c'est dur de savoir qu'elle comptera toujours autant pour toi...

D'autant plus difficile qu'elle ne serait pas juste comme ces souvenirs agréables que l'on range dans un tiroirs et que l'on ressort de temps à autre par nostalgie, sans conséquence. Perséphone allait faire partie de la vie d'Edward pour toujours, liés qu'ils étaient par l'enfant qu'elle portait, cet enfant dont l'existence la retravaillait encore plus maintenant qu'elle avait pu voir combien la grossesse de la jeune fille était avancée.

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dward avait beau lui assurer que ce n'était pas vraiment Perséphone qui comptait pour lui (et donc que c'était plutôt l'enfant qu'elle attendait - oui, c'était difficile d'avoir à parler de cela, mais en même temps, c'était assez de tourner constamment autour du pot, il fallait qu'ils acceptent la situation et qu'ils fassent au mieux avec cette dernière), il avait peine à y croire réellement. Elle se doutait bien sûr que le futur enfant pesait dans la balance, et qu'il avait l'avantage sur Perséphone, mais elle était convaincue malgré tout du fait qu'il tenait plus à elle qu'il ne voulait bien l'avouer... et peut-être même se l'avouer, d'ailleurs. Il suffisait à ses yeux de considérer la manière dont il s'était adressée à elle lors de leur "sauvetage", la façon dont il lui avait si aisément fait confiance, dont il avait accepté de remettre leur vie entre ses mains comme si c'était quelque chose d'évident, sans l'ombre d'une hésitation. On n'agit pas ainsi avec quelqu'un que l'on n'affectionne qu'en partie. Jane était convaincue de cette affection, et c'était ça, le souci. Elle n'était pas dangereuse en soi, elle était juste un peu désagréable à accepter pour Jane. D'autant que le temps ne l'effacerait pas : Perséphone ferait toujours partie de la vie d'Edward. Jane, elle, pouvait bien se contenter de ne jamais revoir Léo (même si là, ils allaient devoir avoir une très sérieuse conversation), tout simplement, mais Edward non. Parce que comme il le disait, elle était enceinte, elle attendait son enfant.

-Bien sûr qu'elle serait venue quand même, assura Jane sans l'ombre d'une hésitation quand Edward affirma que si la jeune sorcière n'avait pas été enceinte de lui, elle les aurait sans doute laissé mourir dans leur cellule. Jane n'y croyait pas une seule seconde, et elle avait du mal à imaginer que son âme soeur puisse y croire pour sa part non plus. C'est sûr, prétendre avoir juste voulu sauver le père de son enfant donnait une bonne excuse à Perséphone, mais Jane était convaincue que la vérité était à trouver ailleurs malgré tout. Elle est encore très amoureuse de toi, ça se voit.

Ce n'était pas forcément une chose à dire, mais Jane ne pensait pas se tromper pour autant. Il y avait des signes qu'elle ne pouvait pas interpréter autrement : la façon dont elle parlait à Edward, dont elle le regardait, dont elle détournait le regard quand elle les voyait ensemble. Elle luttait sans doute contre ça, parce qu'elle n'était sans doute pas masochiste à ce point, mais elle aimait Edward à ce point, c'était sûr et certain. Et donc, forcément, c'était encore moins facile pour Jane de se dire qu'elle verrait son époux régulièrement, elle la femme parfaite qui en plus avait des sentiments pour lui.

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