Un mensonge en entraîne un autre... [pv Léo <3]

J

ane poussa un soupir dégoûté. Le pain avait un goût de carton. Allez savoir s'ils avaient changé de boulanger dernièrement, ou s'il s'était mis à mettre des trucs incorrects dans leur bouffe, mais en tout cas, c'était immangeable. Bon, pour être honnête, dernièrement, Jane n'était pas capable de manger quoi que ce soit sans que cela lui fiche pratiquement automatiquement l'envie de tout dégobiller. Rien de bien surprenant à cela, selon elle. Elle se sentait coupable, et la culpabilité rongeait jusqu'à son système digestif qui agissait désormais de traviole. Elle avait du mal à dormir, à se nourrir correctement, elle était d'humeur de chien tous les quatre matins, et c'était à Léo de réparer les pots cassés et de supporter ses fichues sautes d'humeur. Pour un couple marié depuis seulement quelques semaines, ils ne filaient clairement pas le parfait amour comme devrait le faire de tout jeunes époux. Oh, Léo était toujours adorable avec elle, même l'homme le plus adorable de la terre, et Jane était très attachée à lui et heureuse de l'avoir à ses côtés, mais par moments, elle ne pouvait s'empêcher de se montrer exécrable. Léo était totalement innocent dans l'affaire, mais elle culpabilisait tant et si bien quant à sa propre attitude, quant à ce qu'elle avait osé faire à celui qui, en définitive, n'était même pas vraiment son mari qu'elle avait tendance à reporter la faute sur n'importe qui et n'importe quoi d'autre qu'elle-même... Et c'était injuste, profondément injuste. Ceci dit, elle l'avait toujours été avec Léo, à bien y réfléchir.

Elle y avait vraiment cru, à ce mariage parfait... enfin, qui tenterait d'être parfait. Elle avait vraiment cru qu'à force d'efforts, ils arriveraient à avoir une vie normal et équilibrée, cet équilibre dont ils avaient cruellement besoin, tous les deux. Mais elle avait tout fait foirer. Elle ne savait pas faire autrement que de tout faire foirer à chaque fois, c'était plus fort qu'elle... Comme l'était son attirance - bon, soyons honnête - ses sentiments - Pour son âme soeur, et qui gâchait tout à chaque fois. Ce qu'elle pouvait se détester à ce moment précis ! Ça avait été très simple de ne pas avoir de scrupules, sur le moment. Mais maintenant, tous ceux qu'elle aurait dû ressentir et à côté desquels elle était passée lui revenaient en pleine figure, et le résultat était douloureux. Dans un soupir Jane leva les yeux vers Léo, avec qui elle était supposée passer un déjeuner agréable, elle savait bien qu'elle devait se ressaisir, mieux agir, mais à chaque pas en avant qu'elle parvenait à faire, elle en faisait dix en arrière.

-Tu veux finir mon assiette ? J'ai plus faim... dit-elle d'un ton qu'elle faisait de son mieux pour le rendre agréable. En même temps, il devait s'être habitué à cette situation, elle ne mangeait presque plus rien depuis des jours.. et pourtant elle était loin d'être de celles qui surveillent leur poids ou "font attention". D'ailleurs, elle trouvait ces filles idiotes.

La culpabilité était vraiment une salle maladie. Pourvu qu'elle sache s'en défaire un jour.

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t voilà que, en plus du reste, Léo se faisait du mouron pour elle. Elle aurait aimé éviter ça. Elle lui causait bien assez d'ennuis de manière générale, sans que celui-ci ne puisse s'en rendre compte, elle n'avait pas envie d'en ajouter d'autres encore à cette liste bien trop longue, simplement parce qu'elle était égoïste, et parce qu'elle foulait au pied ses sentiments. Il n'avait pas à s'en faire pour elle, il ne le devait pas. Mais où elle était profondément égoïste, son mari, lui, était l'altruisme incarné, et cela ne venait qu'intensifier sa culpabilité. Bordel, elle avait le coeur au bord des lèvres, c'était une véritable catastrophe. Et en même temps, ce n'était pas prévisible. Elle avait trop souvent tendance à le penser aveugle à tout ce qu'il y avait autour de lui, mais Léo était loin d'être un idiot. Il était seulement bien plus humain et généreux qu'elle ne saurait jamais l'être. Il ne manquait d'aucune attention à son égard. C'était pour cela, même, d'ailleurs, qu'elle avait cru qu'elle parviendrait à se construire une vie équilibrée avec lui. Sauf qu'elle était moisie jusqu'à l'os. Il n'y avait rien qui puisse la sauver. Il n'y aurait jamais rien. C'était ainsi. En compensation, elle aurait voulu qu'il ne remarque rien, ou au moins qu'il ne s'inquiète pas. C'était peine perdue. Et elle ne savait pas quoi lui répondre. Parce qu'il ne méritait rien plus que la vérité, et elle n'était pas à même de la lui apprendre. Elle était bien trop lâche pour cela. Bien trop craintive de tout ce qu'elle pourrait perdre... Et semblait s'efforcer à perdre quelque part.

Elle pouvait tout lui dire ? Non, vraiment pas. Il était certainement l'homme le plus compréhensif de notre Terre, au point même qu'il lui avait pardonné les pires horreurs (y compris l'assassinat de son propre père), mais là, on parlait d'une chose au-delà de tout ce qui est concevable. On parlait d'une trahison bien trop souvent répétée pour pouvoir seulement être qualifiée d'accidentelle, on parlait d'un mensonge qui dépassait de loin tous les autres et qui remettait plus que jamais leur union en cause... Elle ne pouvait rien dire, même si cela la déchargerait peut-être pour de bon de ce poids qui lui tordait l'estomac et lui nouait les entrailles. Elle n'était pas encore prête à renoncer à ce qu'elle avait... Même si cela devrait très certainement arriver à un moment ou à un autre.

-Il m'arrive rien, Léo, ok ? Si tu me laissais respirer au lieu de constamment être sur mon dos, ça irait peut-être déjà mieux. Son ton avait été inutilement agressif. Ces derniers temps, elle s'emportait pour un rien. Pauvre Léo, elle était une véritable plaie pour lui. D'ailleurs, elle ne tarda pas à vouloir se rattraper. Merde... je suis désolée... Je suis vraiment insupportable en ce moment, hein ? Elle poussa un soupir. Je me sens pas bien depuis quelques temps... C'est sans doute rien, mais... Ok, ses troubles étaient aussi physiques, mais elle ne se leurait pas, son soucis était surtout psychologique. Bref, pour ne pas changer, elle mentant comme une arracheuse de dents. Ça te rassurerais, si j'allais voir un médecin ?

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ane n'aimait pas se rendre chez le médecin, elle préférait, et de loin, attendre que le mal passe, sans l'aide de personne. Le problème, c'est que pour le mal qu'elle avait, elle ne pensait pas qu'aucun docteur puisse être véritablement efficace... S'il lui suffisait d'un médicament pour annihiler pour de bon sa culpabilité, elle en avalerait le flacon entier tout de suite, mais ça ne fonctionnait pas comme ça. Il fallait seulement qu'elle arrive à faire taire ce sentiment le plus possible, qu'elle arrive à vivre avec et n'en fasse pas souffrir Léo. Ce n'était pas rien, ce qu'elle avait, mais elle pressentait cela incurable. Enfin, pour la forme, elle pourrait bien aller voir Arseliann, elle lui fournirait deux-trois décoctions à base de plantes contre le stress, et peut-être que ça la soulagerait un peu faute de la soigner. En attendant, elle savait pertinemment qu'il lui fallait faire bien plus d'efforts avec Léo. Le pauvre... Il était l'homme le plus adorable et le plus patient de la terre, et elle se montrait infiniment désagréable avec lui. Elle ne savait même pas pourquoi. Elle était juste à fleur de peau. Elle était capable de sauter à la gorge de son... faux mari à la moindre occasion, comme si elle était habitée par une autre Jane, incapable de douceur et de patience avec quelqu'un qui lui en adressait tant, pourtant. Et déjà qu'elle culpabilisait pour ce qu'elle avait fait, elle culpabilisait à présent de son attitude à l'adresse de Léo... et cette culpabilité fut exacerbée par la phrase qu'il prononça alors.

-Léo... je t'interdis de penser ça.

Est-ce qu'elle menait la vie dont elle rêvait ? Peut-être pas, non...  Si c'était véritablement le cas, elle ne se sentirait pas si mal, elle n'aurait pas fait ce qu'elle avait fait... Mais de quelle vie rêvait-elle, de toute manière ? En fait, elle n'avait jamais fait ce genre de rêve, où elle se projetait dans l'avenir et s'imaginait de telle ou telle manière. Elle savait que son rêve premier avait été d'être sauvée d'elle-même, et elle n'aurait pas pu imaginer plus grand sauveur que Léo. Bien sûr, il ne suffirait pas... Elle avait peut-être été "sauvable" un jour. Ce n'était à présent plus du tout le cas. Mais au fond, cette vie était certainement ce qui se rapprochait au plus près de sa rédemption. Jane se rapprocha de Léo et serra ses mains dans les siennes.

-Tu n'as rien à te reprocher... C'est moi je... je sais pas ce qui cloche chez moi. Ou alors elle le savait trop bien, en vérité. Le fait est qu'elle était sincère, à cet instant, quand elle s'adressait à lui. Elle aurait voulu qu'il lui suffise, elle aurait voulu être quelqu'un d'autre, mais elle était qui elle était, liée corps et âme à un autre, qui détruirait tout d'elle. Avec son consentement. Elle déposa doucement ses lèvres sur les siennes avant d'ajouter : Je n'attendais plus rien, je ne rêvais plus à rien avant toi. Elle se serra contre lui. Tu es tout ce dont j'ai besoin.

Mais pas tout ce dont elle avait envie.

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h non, elle n'était pas celle dont il avait besoin, c'était même tout l'inverse... Elle arrivait à le convaincre du contraire, et c'était là que c'était l'affaire était vicieuse... Léo était l'homme dont elle avait besoin sans pour autant être celui dont elle avait envie, et elle, était celle dont Léo avait envie en croyant en avoir besoin... S'il savait ! Il serait tellement heureux sans elle. Personne ne méritait le bonheur plus que lui... Et par bonheur, elle ne pensait pas à ce bonheur factice qu'elle savait lui offrir mais qui n'était jamais qu'une sévère illusion, une douce supercherie, sans raison ni sens... Elle pensait à celui que l'on pouvait ressentir quand on se sentait entier, qu'on pensait avoir trouvé sa place dans l'univers, quand les nuages, si sombres soient-ils, étaient chassés par une lumière éblouissante... Ce qui lui arrivait quand elle était en présence de son âme soeur, le seul à savoir apaiser son âme, alors qu'il était contradictoirement celui qui la tourmentait en premier lieu... Elle devrait lui dire tout cela, elle devrait le lui apprendre une bonne fois pour toutes et mettre un terme définitif à l'illusion... Mais chaque esquisse de tentative s'évanouissait comme de la vapeur. Elle ne pouvait pas, elle n'y arrivait pas. Elle aimait les étreintes comme celle-ci, elle aimait compter à ce point pour quelqu'un d'autre, elle aimait s'imaginer que cet homme serait prêt à tout pour elle, qui le méritait si peu. Donc, une fois de plus, elle se tairait, ne dirait rien, et savourerait l'instant avec, pourtant, le sentiment que quelqu chose lui manquait.

Ce fut pour Jane un soulagement que d'entendre celui qui aurait dû être son mari (et qui pensait d'ailleurs l'être) revenir sur un sujet de conversation plus léger.. Quoi que peut-être pas complètement, puisqu'il restait d'englober un mensonge supplémentaire. Léo avait sans doute trouvé du travail. En soi, c'était une excellente chose. Il était grand temps qu'ils prennent leurs vies en main et se responsabilise... Et puis, si ça permettait à Léo de ne pas avoir qu'elle pour décor et entourage... D'ailleurs, elle aussi avait trouvé du travail... Mais étonnamment, elle ne s'était pas vraiment précipitée auprès du jeune homme pour le lui apprendre... Les raisons en étaient manifestes.

-Oh c'est vrai ? un sourire s'étira sur ses lèvres, lèvres qu'elle déposa brièvement sur celles du jeune homme. C'est génial ! Ce serait pour travailler dans quoi ? Elle hésita, à peine une crise désamorcée, elle n'était pas convaincue de devoir en déclencher une autre, mais après tout, quand elle s'absenterait tous les jours pour aller travailler pour les Baker, il faudrait bien qu'il sache pourquoi... ou au moins en partie. Ça doit être un signe, on m'a aussi offert un emploi.

Bon, voilà, c'était dit. Restait à savoir jusqu'où elle serait capable d'aller dans les explications. Elle pressentait qu'elle allait, une fois de plus, être d'une lâcheté confondante, à croire qu'elle ne savait pas adopter une autre position quand elle était en présence du jeune homme qui, définitivement, méritait mieux, tellement mieux qu'elle.

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onathan Caldwell. Quand Jane entendit son nom, la jeune femme fit au mieux pour ne rien laisser paraître (elle devenait plutôt douée, à force, à cet exercice, ce qui n'était certainement pas une bonne chose au demeurant). La dernière fois qu'elle avait vu le myrihande de l'air, ce dernier avait en effet suggéré qu'elle parle à Léo de son offre d'emploi, pas tant par altruisme que pour lui laisser du temps avec son âme soeur et pouvoir le ramasser à la petite cuillère le "moment venu", moment que Jane ne comptait pas voir venir, donc, même si le sort aurait tôt fait de décider de ce point de vue là à sa place. Jane avait refusé, Jonathan l'avait presque menacé, et au final, elle avait plus ou moins promis de mentionner l'existence du poste à pourvoir à son époux (qui ne l'était pas vraiment, bon...)... mais elle ne l'avait pas fait. Jane s'était ravisée, et pour cause, elle se jouait suffisamment du jeune homme au quotidien pour ne pas vouloir encore en rajouter une couche supplémentaire... Mais qu'elle le veuille ou non, l'homme avait malgré tout obtenu ce qu'il voulait, et Léo allait bel et bien bosser pour un myrihande qui, non content de connaître sa nature en plus de ses (trop) nombreux écarts avec son âme soeur, savait également que tous les deux n'étaient pas exactement mariés. Super. Dire que ça ne la réjouissait pas était en-dessous de la vérité. Mais bien évidemment, elle ne pouvait rien dire. S'opposer soudainement à cette nouvelle après s'en être réjouie serait suspect, d'autant qu'elle n'était pas supposée connaître Jonathan outre mesure... il fallait qu'elle lui fasse confiance, il ne la trahirait pas... et puis, étant donné ce qu'elle devait lui apprendre de son côté, elle n'avait pas vraiment son mot à dire. Car oui, si elle n'avait pas été certaine de lui dire la vérité, elle avait décidé de se montrer parfaitement honnête... enfin, sur ce sujet-là. Elle lui mentait trop, ce qui lui venait à l'esprit en était une preuve supplémentaire... c'était une information qu'il connaîtrait forcément à un moment ou à un autre, autant que ce soit maintenant, et de désamorcer la bombe avant qu'elle n'explose. Si elle n'explosait pas.

-Preston... Baker. Son regard ne lâchait plus celui du jeune homme. Elle savait que, quelle que soit la façon dont il accueillerait cette information, elle aurait peu de chances de le laisser indifférent. Je m'occuperai de gérer sa paperasse, son courrier, des trucs comme ça. Elle marqua une pause. J'accepterai pas si tu veux pas que je le fasse. Bon, d'accord, en vrai elle avait déjà accepté, c'était même elle qui avait convaincu Preston de lui laisser sa chance, mais il n'était pas obligé de le savoir, ça, hein ? Oui, même au cours de ses rares élans d'honnêteté, elle se voyait contrainte (ou incapable de faire autrement) de distiller un soupçon de mensonge. Il m'a promis que je ne verrais jamais son frère. Son regard ne quittait toujours pas le sien. Je suppose qu'il a proposé de m'embaucher pour l'emmerder, d'ailleurs, mais j'ai vraiment besoin de bosser.

Ça, il pouvait le comprendre, ils savaient depuis un moment l'un comme l'autre que c'était la condition pour qu'ils puissent poursuivre leur train de vie actuel. Avec un peu de chance, cet argument jouerait en sa faveur.

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ane le voyait bien, Léo n'était pas enchanté à l'idée qu'elle aille travailler pour les Baker, et d'une autre côté, toute autre réaction que celle qu'il eut lui aurait semblé vraiment étrange (quoi qu'elle aurait compris qu'il s'emporte plus que cela), il ne pouvait pas sauter de joie à la perspective de la savoir travailler où vivait son âme soeur, c'était logique... mais il ne s'y opposait pas. Jane ne savait vraiment pas ce qu'elle avait pu faire dans la vie (car elle considérait que chacun de ses actes jusque là avaient quelque chose de condamnable) pour croiser le chemin de quelqu'un d'à ce point exceptionnel et, par-dessus le marché, s'attirer ses sentiments. Elle ne le méritait pas, c'était un constat fait de longue date, et qui se vérifiait chaque jour un peu plus. Elle savait qu'il était l'homme idéal, et son application à tout gâcher d'elle-même n'avait rien de pardonnable. Elle faisait tout simplement n'importe quoi, et au stade où elle en était, il était quasiment impossible qu'elle inverse la tendance un jour. Quand, par exemple, il lui avait dit qu'il ne s'opposerait pas au fait qu'elle travaille pour Edward, elle aurait sans doute dû dire que, puisqu'elle voyait que cela le dérangeait un peu, elle trouverait autre chose. Mais non. Elle n'avait pas l'intention de faire marche arrière. D'autant que c'était elle qui avait proposé à Preston de l'embaucher en premier lieu, dans des circonstances qu'il valait mieux que Léo ne connaisse pas. Et le pire, dans tout cela, c'était qu'elle réfléchissait avant tout à une manière de mieux faire passer la pilule auprès de son faux mari, elle était en train de devenir une vraie manipulatrice. Ou peut-être qu'elle l'avait toujours été, mais Léo en faisait clairement les frais plus que quiconque. Jane serra plus fermement les mains de son interlocuteur dans les siennes, tout en plongeant son regard dans le sien.

-La seule chose dont j'ai envie, Léo, c'est d'une vie calme normale, sans nuages, où on ne manquera de rien... Elle déposa un doux baiser sur ses lèvres. Tu pourras toujours me demander de démissionner si ça te dérange.

Elle le prenait par les sentiments. Comme bien souvent, somme toute. Pourtant, elle n'était pas complètement malhonnête, non, elle la voulait vraiment, cette vie calme et sans nuages. Le problème, c'est que ce rêve disparaissait complètement au profit du tumulte constant que lui faisait éprouver son âme soeur, et qu'elle ne devrait pas trouver si horrible que cela, sans quoi elle n'en redemanderait pas encore et encore. En attendant, c'était son meilleure moyen de se justifier. Au moins, pour une fois, elle aurait été honnête sur un point en particulier. Elle se serait mal vue rejoindre le domaine des Baker tous les jours et prétendre qu'elle allait travailler ailleurs. Outre le fait qu'elle se serait faite griller au bout d'un moment, elle faisait suffisamment de mal autour d'elle comme cela. Et à Léo en particulier. C'est fou quand même, elle se féliciterait presque d'avoir dit la vérité sur quelque chose d'à ce point basique... Elle était vraiment quelqu'un d'ignoble.

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lle avait trouvé les mots qu'il fallait, avait usé des gestes nécessaires, et voilà, une fois de plus, le jeune homme qui ne se doutait de rien, ne voyait rien (ou ne voulait rien voir), se laissait avoir, et même si Jane avait toujours des scrupules à le manipuler comme elle le faisait de plus en plus fréquemment et avec de plus en plus d'aisance, malheureusement, elle se sentait soulagée d'avoir pu parler de l'emploi qu'on lui avait offert (pour ne pas dire qu'elle s'était proposée d'elle-même), ça faisait un mensonge en moins sur sa conscience. Elle sentait bien que Léo n'était pas très emballé par cette nouvelle, mais au moins, il l'acceptait. Décidément, il ne devait pas y avoir dans toute notre terre un homme qui ait autant de valeur que celui que tout le monde croyait être son époux. Et elle l'accaparait sans vergogne, le malmenait, lui mentait, se montrait plus cruelle qu'aucun être humain pouvait l'être. Elle aurait aimé pouvoir lui dire tout cela et croire le moindre mot. Elle n'en était pas capable. C'est tout, elle voulait, elle n'y arrivait pas, elle ne pouvait pas. Et plus ce constat s'imposait à elle, moins, il fallait bien le dire, elle faisait d'efforts. On verra bien comment ça se passe. Mieux valait se dire cela, même si Jane savait pertinemment comment les choses allaient se passer. Se retrouver tant de fois au même endroit qu'Edward, éprouver cette chaleur au quotidien... Forcément, qu'elle craquerait, c'était obligé... Et en fait, elle avait très envie de craquer, même si cela faisait d'elle auprès de Léo la pire compagne du monde.

Tous ces espoirs qu'elle allait détruire un à un ! Et dire que, quand il parlait de cette fameuse solution qu'Enjolras devait trouver pour les séparer, il y croyait et pensait que, tous autant qu'ils étaient, ils n'attendaient que de voir ce moment arriver... Au final, il n'y avait qu'Enjolras et lui pour vouloir que la première arrive à ses fins. C'était ignoble, mais c'était comme ça, elle ne pouvait plus se mentir à elle-même sur le sujet. Elle était devenue une myrihande tardivement, mais elle avait le sentiment que ça avait toujours fait partie d'elle, elle était convaincue que ça avait toujours fait partie d'elle, et elle ne pouvait pas vivre sans cela, elle en serait tout bonnement incapable. Tout ça lui était contradictoirement aussi nocif que vital. Elle était incapable de se passer d'Edward, sans ce lien, ce serait sans doute pareil, sauf qu'il était devenu constitutif d'elle-même au point qu'il lui était tout simplement impossible d'imaginer faire autre chose, vivre autre chose, vouloir autre chose. Même si elle avait espéré qu'elle saurait un jour préféré Léo à tout le reste. Elle ne pouvait plus y croire, à présent.

-J'ai hâte. affirma-t-elle de nouveau avec la plus entière et vive des fausses sincérités. Elle n'avait vraiment plus à se forcer pour savoir mentir. Et parce qu'elle ne pouvait tout de même pas soutenir son regard aussi longtemps en étant à ce point hypocrite, elle se serra doucement dans ses bras.

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