On dit que le silence est d'or...

Quand une sorcière tombe enceinte après une aventure d’une nuit avec un ondin ça donne… Moi. Une sorte de paria involontaire ni ondin, ni sorcier mais banal humain mit de côté et oublié des siens. Je sais, dis comme ça, ça fait très larmoyants mais personnellement, je le vis plutôt bien. En même temps, j’ai toujours vécu ainsi.

Pour entrer un peu plus dans les détails, ma mère était à l’époque une jeune sorcière un peu trop frivole qui n’a pas opposé particulièrement de résistance face à un ondin dont je ne sais rien hormis sa nature et dont je me fiche un peu à vrai dire. D’autant qu’à ce que ma mère m’a affirmée, il serait décédé il y a de cela bien 20 ans maintenant. J’ignore si c’est vrai ou pas et je n’ai jamais cherché à le savoir. De voir leur fille de 18 ans accoucher d’un enfant humain ne fut pas spécialement pour plaire au reste de la famille qui la rejeta. Mais loin d’en souffrir, ma mère vécu une vie remplie et heureuse loin d’eux jusqu’à son décès des suites de la maladie il y a 1 an. Une joie de vivre qu’elle s’efforça de me transmettre mais les choses furent un peu plus compliquées pour moi.

Dans mes premières années, j’étais quelque peu le souffre-douleur de mes camarades d’école. Celui qui n’avait non seulement pas de père mais dont personne ne savait qui il était. Celui aussi dont malheureusement les exploits sexuels de ma mère faisait régulièrement les ragots. Et les choses ne s’améliorèrent pas avec le temps.

Pour mes 8 ans, j’avais invités quelques camarades – car oui j’avais tout de même des amis malgré tout – à la maison pour un goûter. Comme il faisait mauvais, nous avions dû nous contenter de jouer à l’intérieur, dans la grande véranda à l’arrière de la maison. Portés par notre gaieté et cette énergie débordante qu’on les enfants, nous avions débuté une partie endiablée de ballon. Mais alors que je voulais le rattraper, j’ai trébuché sur un jouet trainant parterre. Ce fut le fracas de la baie vitrée qui céda sous mon poids qui alerta ma mère avant même les hurlements de mes camarades. Tout ce dont je me souviens de l’accident est une douleur cuisante au visage avant de perdre connaissance. Je ne me suis réveillé que 4 jours plus tard.

La vitre que j’avais traversée m’avait profondément entaillé l’épaule et le visage au niveau de l’œil, y laissant d’épaisses balafres. Par chance, mon œil fut indemne. Mais la blessure la plus grave était à mon cou. Un large bout de verre s’y était planté, frôlant de peu la carotide mais ne loupant pas mes cordes vocales. En se plantant et en étant retiré, le bout de verre me les endommagea gravement, me rendant désormais à peine capable d’émettre quelques sons rauque mais surtout, incapable d’articuler le moindre mot.

Défiguré et muet, je fus rejeté même de mes amis et fini rapidement par déserter l’école au profit d’enseignements donné par ma mère. Ce fut durant ses années de solitudes que je développais une certaine fascination pour le feu. Alors non, pas dans le sens pyromane de terme. Grâce à ma mère, j’appris à le maitriser autant qu’il puisse l’être lorsque l’on est incapable de magie. Elle m’apprit à fabriquer des poudres s’enflammant en un simple frottement puis à jongler avec des barres et des cordes enflammées. Cela me valut bien des brûlures mais je ne m’en souciais guère. Après tout je n’étais plus à cela prêt niveau cicatrice.

A la fin de l’adolescence, je commençais à prendre l’habitude de faire des démonstrations lors des fêtes du village et peu à peu à reprendre contact avec les habitants. Cela me permit également de trouver des boulots ici et là. Encore maintenant, quand je ne joue pas avec le feu, je travaille là où l’on veut bien me donner des choses à faire.

Je ne suis pas quelqu’un de très sociable. Ce n’est pas que je n’aime pas les gens, bien au contraire, c’est juste que d’avoir vécu en retrait et mes problèmes m’ont rendu plutôt timide. Mon rapport avec la foule est d’ailleurs assez ambigu. J’aime avoir du public quand je fais mes représentations, entre les applaudissements et voir le regard des gens quand ils me voient « danser » avec mes instruments enflammés. Mais dès que le spectacle est fini, je suis mal à l’aise entouré de monde.

Il faut dire que j’ai conscience que mes cicatrices peuvent rebuter certains et le fait que je sois dans l’incapacité de m’exprimer autrement que par mime ou pas écrit n’aide pas vraiment. Il faut dire que tenter d’avoir une conversation avec moi demande une certaine dose de patience et d’esprit de déduction.

Du coup, je passe facilement pour quelqu’un de lunatique et difficile à aborder. Pour beaucoup, je ne suis pas vraiment quelqu’un de fréquentable mais plutôt un homme froid et distant dont il vaut mieux se méfier. Les préjugés ont la peaux dures.

Je ne pense pas être pourtant quelqu’un de particulièrement froid ou désagréable. Il est vrai que je n’ai pas le sourire facile et que niveau culture, on fait mieux quand même. Du coup, ma meilleure amie est une fouine qui ne porte pas de nom, ce qui est logique vu que de toutes manières je ne peux pas l’appeler.

Généralement, je suis quelqu’un de calme et de discret. Cela peut paraitre contradictoire pour quelqu’un qui aime littéralement se donner en spectacle mais le reste du temps, je ne suis pas du genre à attirer l’attention sur moi. Je me montre méfiant avec les gens que je ne connais pas mais quand je donne mon amitié, c’est sans demi-mesure. En revanche, si l’on me trahit, là aussi ma colère n’est pas qu’en demi-teinte. Toutefois, j’évite la violence quand je le peux. Enfin, la plupart du temps en tout cas.

Enfin, il n’est pas rare de me trouver à la taverne. Sans être alcoolique, du moins je l’espère, il est vrai que j’ai facilement tendance d’y passer plusieurs soirs par semaine.