Tu n'aurais pas dû voir ça. [pv Joachin :3]

C'

était très étrange que de rencontrer ainsi les parents de Scott, dans ces circonstances ô combien étranges. Elle avait espéré un jour pouvoir faire leur connaissance, mais elle devait bien admettre avoir espéré que cela se passe dans des circonstances différentes. Elle aurait voulu que Scott les présente tout simplement parce qu'elle était la femme qu'il aimait et avec qui il voulait partager sa vie, elle aurait voulu être adoptée par la famille de Scott, pouvoir faire comme tout le monde, en somme. Mais bien évidemment, ce n'était pas si simple. Elle en avait conscience, et ça lui faisait mal. Au final, elle devait se contenter de ce qu'elle avait. Elle avait au moins le privilège de tenir un rôle plus concret dans la vie de Scott en intervenant comme elle le faisait. Elle avait moins le sentiment de n'appartenir qu'à un fragment de son existence qu'il laissait de côté dès son retour au village... Elle aurait tant voulu qu'il n'y ait pas une vie en jeu, pour cela ! Mrs Barnes allait mal. C'était un crève-cœur pour la jeune femme de la voir en si faible posture. Elle ne pouvait que lui apporter son soutien et de la compagnie, malheureusement pas de remède à la maladie qui la rongeait. Coraline ne l'assistait que depuis quelques jours, mais elle la voyait déjà décliner, et ça l'inquiétait.. elle n'osait même pas imaginer la douleur que ce serait pour Scott de perdre sa mère, et elle, elle ne savait que faire. Et elle s'était prise de sympathie pour cette femme. Elle était vraiment adorable. Scott avait de qui tenir. Elle ne méritait vraiment pas son sort.

Le jour allait se lever sous peu, Coraline avait par conséquent pris congé de Mrs  Barnes. Elle ne pouvait pas prendre le risque de s'exposer à la lumière qui filtrait à travers les fenêtres de la maison. Il était temps pour elle de retourner à la forêt. Et vite, si possible, car en plus du retour du soleil, les effets de la potion allait sans doute s'estomper. C'était sous son apparence adulte, en effet, qu'elle traversait la grande place du village. Perdue dans ses pensées, elle ne s'attendait absolument pas à rencontrer une personne connue... Encore moins à ce point familière. Coraline hésita en voyant Joachin. Finalement, les mots sortirent tout seuls alors même qu'elle oubliait instantanément que son apparence n'avait rien de familière à Joachin, en ce moment précis.

-Qu'est-ce que tu fais là ? demanda-t-elle.

Elle se posait sincèrement la question. Joachin n'avait techniquement pas plus de raisons de se trouver ici, au village, qu'elle-même. Sauf qu'en posant cette question, elle prenait le risque qu'elle se retourne contre elle. Elle aurait mieux fait de passer son chemin et espérer qu'il ne la reconnaisse pas. Car elle n'était pas certaine de pouvoir partager ça avec lui. En même temps, techniquement, ils ne devraient plus rien partager. Une résolution qu'elle avait manifestement du mal à tenir.

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lle aurait vraiment dû réfléchir avant de parler, c'est sûr, mais la surprise l'avait largement emportée sur la raison. Le village était le dernier endroit où elle avait pensé le croiser, déjà qu'elle-même ne s'y rendait d'ordinaire jamais, Joachin était supposé éviter ces lieux pour sa part (quoi qu'elle ne s'était pas autorisée à être à jour sur ce qui se passait dans sa vie... Mais le destin, de toute évidence farceur, avait choisi de les réunir de nouveau en ces circonstances exceptionnelles, et la buveuse de sang avait bien conscience qu'il faudrait sans doute qu'elle s'en justifie. Il y avait peut-être une raison à ça. Coraline ne croyait pas forcémen au destin, mas à certains moments, c'était à se demander, quand même. Prenant du recul sur la situation, et puisque, manifestement, Joachin l'avait reconnue, elle avait choisi de ne pas se défiler. Elle aurait sans doute pu, pourtant. Même s'il pensait l'avoir reconnue elle aurait très bien pu prétendre qu'il se trompait et tracer sa route. Mais elle n'avait pas envie de se jouer de lui. Il y avait déjà eu suffisamment de mensonges entre eux comme cela. Enfin à moitié. Sa curiosité la poussait à admettre qu'il puisse se poser des questions sur elle, c'était donnant-donnant. Alors elle accepta de répondre par la positive. Elle hocha doucement la tête avant de bien vouloir prendre la parole. Expliquer sa situation de bout en bout serait beaucoup trop long, alors elle opta pour une réponse aussi courte qu'énigmatique, sans doute, mais qui très temporairement éludait tout interrogatoire éventuel.

-Ouais. Elle fit un mince geste des bras qui était supposé évoquer ce corps qui n'avait qu'une existence factice, à cause de lui, d'ailleurs. C'est une longue histoire.

Et c'en était une en effet. D'autant que Coraline avait été très discrète au sujet de Scott. Trop de reproches sous-jacents. Elle avait préféré laisser cela à son jardin secret, peut-être pas pour longtemps encore. Au fond, elle apprécierait de pouvoir se confie à son interlocuteur au sujet de l'homme qu'elle aimait, partager ses doutes, difficultés et appréhensions avec lui. Mais tout était si compliqué ! Elle marqua une légère pause et choisit d'embrayer de suite plutôt que de laisser à Joachin l'occasion de l'accabler de questions. Elle gagnait du temps comme elle le pouvait, quoi.

-T'as pas répondu à ma question, remarqua-t-elle donc. Qu'est-ce que tu fais là ?

Si leurs relations étaient loin d'être apaisées, elles étaient au moins un peu plus détendues, alors elle pensait pouvoir légitimement afficher sa curiosité et en plus espérer une réponse de la part du vampire. Il fallait bien qu'il lui en donne pour qu'elle daigne se plier au même jeu de son côté. Si Joachin était là, c'était forcément pour une raison précise, ça ne pouvait pas être anodin.

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oraline grimaça en découvrant que Natasha, l'épouse de Joachin, était tombée malade. Elle ne pouvait qu'imaginer le désarroi de son père de cœur. Elle le connaissait suffisamment, en dépit de leurs différends, pour savoir combien il aimait encore sa femme (et sa fille, mais ça c'était un sujet plus délicat) même s'il avait été contraint de l'abandonner (ce qu'il n'avait jamais fait que par amour, d'ailleurs)... s'il devait la perdre dans de telles circonstances, elle était convaincue qu'il ne s'en remettrait pas, comme elle-même serait incapable de supporter de perdre Scott de cette manière. Pour le moment, elle avait de la "chance", Scott n'était pas malade, mais ce pourrait arriver vite, elle le savait bien, cette maladie était aussi fulgurante que mortelle, malheureusement... Elle voulut dire quelque chose, n'importe quoi... même si leur relation était... délicate, en ce moment, elle ne s'imaginait pas ne pas lui apporter son soutien alors qu'il souffrait si visiblement, mais il ne lui en lassa pas le temps. Il l'interrogea, la prit de court. Et c'était parfaitement normal. Forcément, il était intrigué par l'apparence qu'elle revêtait... et il méritait sans doute qu'elle lui explique toute l'histoire, sauf qu'elle n'exagérait rien en affirmait que cette histoire était longue. Elle ne lui avait pas parlé de Scott et de leur histoire, c'était à peine si elle évoquait Dean Appers avec lui, alors ça ferait sans doute beaucoup de choses à assimiler d'un coup. D'un autre côté, peut-être avait-elle besoin de se confier à ce sujet, même si elle ne savait pas si Joachin allait vraiment comprendre non pas sa situation mais ces choix. Elle prit une grande inspiration et se confessa.

-Pas longtemps après avoir été mordue... par lui, mais elle choisissait de passer cette information sous silence, cette fois. J'ai rencontré ce garçon, du même âge que moi. On était très amoureux... mais je lui ai avoué que j'ai été un vampire, et on ne s'est pas revus... jusqu'à il y a quelques mois. Elle marqua une pause. Un sorcier m'a préparé une potion pour que je puisse ressembler à ce que j'aurais dû être si j'étais restée humaine, je peux être plus proche de lui, comme ça... Même si leur histoire restait malgré tout pour le moins compliquée. Mais ses effets partent vite. Elle marqua une nouvelle pause. Sa mère est malade, il ne peut pas s'occuper d'elle, je me suis portée volontaire, mais il faut que je garde cette apparence... elle ne comprendrait pas, sinon. Elle avait le sentiment que personne ne les comprendrait jamais quoi qu'il en soit. Elle leva les yeux vers Joachin, ça lui faisait du bien, à vrai dire, de lui parler à cœur ouvert comme elle ne l'avait pas fait depuis bien longtemps. Trop longtemps, peut-être. Je suis vraiment désolée de ce qui arrive à Natasha.... j'espère qu'elle va s'en sortir.

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était vraiment étrange pour Coraline que de déballer ainsi toute son histoire à son père de cœur, ne serait-ce que parce que, au final, elle n'avait pu évoquer cette histoire avec personne. Il y avait bien dans son entourage une ou deux personnes qu'elle appréciait plus ou moins, qu'elle estimait plus ou moins... mais elle n'avait pas vraiment d'amis, elle n'avait plus de famille. La personne dont elle s'était sentie le plus proche depuis sa transformation à part Scott, c'était clairement Joachin, et pourtant, elle ne lui avait jamais parlé de son histoire. Et pas sans raison, bien sûr. À l'époque, quand elle et Scott étaient encore enfants, elle n'avait pas voulu lui en parler, parce qu'elle pensait qu'il la dissuaderait de le revoir, comme lui-même avait coupé les ponts avec sa femme et sa fille, se sachant dangereux pour elle. Elle n'avait pas voulu qu'on lui interdise ses rendez-vous avec Scott, elle y tenait beaucoup trop. Puis ensuite, il y avait eu sa "rupture", et elle avait préféré gardé sa douleur pour elle. Ensuite, après qu'ils se soient revus, tout s'était accéléré. Coraline avait découvert le secret de Joachin, elle avait compris quel rôle il avait joué dans sa transformation... si bien qu'il n'y avait que maintenant qu'elle daignait enfin parler à l'homme qu'elle continuait de considérer comme son père malgré les circonstances de celui qui faisait battre son cœur. Ça lui faisait du bien de pouvoir se confier enfin à ce sujet, même si elle n'était pas pour autant d'humeur à se sentir soulagée. Parce qu'elle était sous tension, alors que l'état de la mère de Scott ne s'améliorait pas, et parce qu'elle voyait que Joachin souffrait de l'état où se trouvait son épouse.... et elle ne parvenait pas à se montrer insensible à ce sujet. Quand il s'excusa pour Mme Barnes, puis plus largement pour les efforts qu'elle devait fournir pour être avec l'homme qu'elle aimait, elle ne dit rien, elle ne réagit pas. Elle ne pouvait pas prétendre que ça ne lui faisait rien, ce n'était pas le cas. Mais elle lui reprocherait toujours de l'avoir privée de la possibilité de vivre pleinement son histoire d'amour, en ressemblant à qui elle était au fond d'elle. Elle haussa les épaules quand il lui demanda si la potion n'était pas dangereuse.

-J'en sais rien, déclara-t-elle alors. C'était la vérité. Pour l'instant, elle n'observait pas d'effets secondaires trop alarmants, mais elle devait quand même admettre que chaque prise de la potion semblait l'affaiblir un peu plus, et c'était devenu plus flagrant à présent qu'elle devait l'utiliser à un rythme élevé pour prendre soin de la mère de Scott. Je m'en fiche. Je préfère vivre dangereusement que pas du tout, décréta-t-elle alors.

C'était tout ce qu'elle avait pour se ressembler un tant soit peu. Alors qu'importe les risques, elle ne pouvait pas y renoncer.

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oraline esquissa un fin sourire en entendant la réponse de celui qu'elle ne pouvait s'empêcher de considérer encore comme son père de coeur malgré les circonstances. Elle n'était pas vraiment surprise de l'entendre dire qu'il s'inquiétait. Et même si elle n'avait pas envie qu'il se ronge les sangs pour elle, elle devait reconnaître qu'elle appréciait. Elle avait besoin qu'il s'inquiète pour elle comme elle avait besoin qu'il veille sur elle, même si ça ne changerait pas grand-chose au fait qu'elle ferait les choses à sa manière, qu'elle ne lui pardonnerait jamais.Quoi qu'il puisse dire, faire ou penser, elle ne changerait pas de manière de faire, de manière de vivre, elle continuerait de boire la potion quand bien même cela devait la détruire à petit feu, pour le seul et unique plaisir de se sentir vivante et elle-même dans les quelques instants où elle pouvait avoir l'apparence qui aurait dû être la sienne si les circonstances avaient été différentes, pour le plaisir de voir du désir briller dans le regard de l'homme qu'elle aimait quand il posait les yeux sur elle, pour le plaisir d'obtenir les gestes d'affection qu'il n'accepterait pas de lui accorder en temps normal... Cela méritait tous les risques possibles, et ce n'était bien évidemment pas Joachin qui saurait lui faire changer d'avis à ce sujet. Encore moins aujourd'hui, alors qu'elle avait appris à se détacher de cette figure paternelle pour voler de ses propres ailes, même s'il lui manquait bien souvent cruellement, puisque tant d'année d'affection et de complicité ne pouvaient être tues et ignorées.

Joachin semblait deviner que son opinion n'aurait pas d'incidence sur les choix de sa fille de coeur, et même, il lui laissa entendre qu'il les cautionnait en affirmant qu'il la comprenait. Elle devait admettre apprécier d'entendre ces mots. À l'heure actuelle, elle avait grand besoin d'être comprise. Et en effet, c'est vrai, si quelqu'un pouvait bel et bien être capable de la comprendre, ce ne pouvait être que lui, en dépit de ce qu'ils traversaient, ou en partie à cause de ce qu'ils traversaient. Le buveur de sang ajouta qu'il aurait dû faire la même chose aussi, soit assumer tous les risques et tous les dangers pour vivre au mieux son éternité, pour ne pas passer à côté de ses sentiments. Coralin devinait sans mal qu'en s'exprimant ainsi, il parlait avant tout de sa femme et de sa fille.

-C'est peut-être pas trop tard, tu sais, suggéra Coraline.

Mais au fond, rien ne le garantissait. Après tout, Natasha était, lui avait-il dit, entre la vie et la mort, peut-être qu'il était déjà trop tard, dans ce cas. Mais il lui restait sa fille, Jane, même si cette pensée rendait Coraline foncièrement jalouse.

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Coraline savait bien qu’elle ne pouvait pas parler à la place de Joachin, elle ne vivait pas sa vie, elle ne pouvait pas exactement savoir dans quelles proportions les épreuves qu’il traversait étaient pénibles pour lui quand bien même ils avaient des histoires similaires, et surtout, elle ne pouvait pas lui promettre que tout allait s’arranger, qu’il n’était pas trop tard, alors qu’elle-même ne savait pas si les choses s’arrangeraient un jour ou non ne serait-ce que pour elle-même. Elle était bien placée pour savoir que la vie faisait rarement le moindre cadeau, et la mort encore moins, mais quand bien même la situation entre celui qu’elle considérait quoi qu’il arrive comme son père de cœur et elle était compliquée, elle tenait malgré tout à son bonheur, elle voulait qu’il trouve une façon équilibrée de vivre ce qu’il lui restait d’existence, elle voulait croire qu’il pouvait encore renouer avec son épouse et sa fille. Et en parlant de sa fille, justement… La buveuse de sang se retint de grimacer quand Joachin prononça le nom de Jane… C’était bête, mais elle détestait cela. Elle devrait être heureuse que le dialogue soit rétabli entre son père et sa fille, mais en vérité, le retour de Jane dans la vie de Joachin lui donnait le sentiment que ce dernier n’avait plus vraiment besoin d’elle, même s’il lui prouvait sans arrêt le contraire. Pourquoi préfèrerait-il une fille de substitution qui avait choisi de prendre ses distances avec lui plutôt que sa vraie fille ? Enfin bon, elle fit de son mieux pour ne pas trop laisser paraître ce qu’elle pensait et écouta donc ce qu’il lui apprenait. Jane voulait qu’il transforme Natasha si c’était la meilleure façon de la sauver. Au fond, Coraline comprenait le point de vue de Jane, elle voulait sauver sa mère à tout prix. Mais elle ne comprenait pas. Ce n’était certainement pas de cette façon que l’on sauvait une âme. C’était de cette façon qu’on la condamnait pour de bon.

-Il ne faut pas que tu le fasses, tu as raison, admit Coraline. Elle pouvait sembler mauvaise ou décourageante, mais en l’occurrence, elle disait vraiment cela dans l’intérêt de l’épouse de Joachin. Elle serait certes encore de ce monde s’il se décidait à la transformer, mais le prix à payer ne serait que trop terrible. On ne pouvait infliger cela à quelqu’un qu’on aimait réellement, c’était un sort bien trop terrible, épouvantable. Ce n’était pas pour rien que, à l’époque, Coraline n’avait pas proposé à Scott de le transformer. Et elle ne le ferait pas davantage aujourd’hui, ou de toute façon, la situation, au vu de son apparence, s’était largement compliquée. Elle ne mérite pas de subir ça… dit-elle doucement. Jane ne comprend pas, c’est normal, elle ne peut pas avoir idée de ce que c’est.

Même si elle savait ce que c’était que d’être une créature (ce que Coraline ignorait, ce n’était pas pareille quand on était contraint à la vie éternelle, à la soif inextinguible de sang humain.

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ue Jane Hardwick ne comprenne pas n'étonnait pas le moins du monde Coraline, et le fait que Joachin le confirme était pour tout dire bien loin de déplaire à la jeune femme, tout au contraire, même, elle aimait bien l'idée d'avoir cette connivence avec Joachin que sa fille, la chair de sa chair, ne possèderait jamais, elle, elle aimait l'idée d'être mieux à même de le comprendre que sa propre fille. Bien sûr, tout ça n'était qu'une question de jalousie et de possessivité, il faut bien le dire. Alors qu'elle n'en avait même pas le droit alors qu'elle était supposé rejeter le buveur de sang autant que possible. C'était plus fort qu'elle, c'était Joachin, qui avait joué les figures paternelles pour lui pendant des années. Forcément, cela laissait des traces, et puisqu'elle avait été plus longtemps la fille de Joachin que sa propre fille, elle avait envie de pouvoir le revendiquer, tout simplement... et pas si simplement en même temps, c'est vrai. Natasha, quoi qu'il en soit, n'était pas d'accord. Tant mieux, Coraline n'aurait pas apprécié qu'il supporte en sus le réclamations de son épouse, à deux Hardwick contre un, elles auraient peut-être gagné. Mais puisque la principale concernée n'était pas d'accord, l'espoir restait très clairement permis. Il n'empêche, Coraline n'aimait pas spécialement d'entendre cet ajout, parce qu'elle se disait que s'il était au courant que Narasha ne voulait pas être mordue, c'était qu'il lui avait posé la question, c'était qu'il avait évoqué le sujet avec elle. Et cette seule pensée la faisait frissonner et était susceptible de sincèrement l'agacer, il faut bien le dire. Elle préféra néanmoins ne pas faire de commentaire à ce sujet. Normalement, c'était supposé ne pas la concerner, mais elle était bien plus sensible à cela que tout ce qu'elle pouvait bien prétendre, et elle y serait sensible tout au long de son éternité, ça c'était une certitude.

-Je suis sûre que tu trouveras, assura Coraline, même si en fait, elle n'avait aucune raison d'être sûre d'elle, elle souhaitait juste de tout coeur qu'il évite la pire de toutes les solutions, et elle avait envie de croire aussi qu'il s'en tirerait, parce que sa femme s'en tirerait. Mais c'était là faire preuve d'un idéalisme qui frôlait l'absurde, et ça, il le savait très bien. Je crois que le sorcier des grottes travaille sur un antidote... Elle ne voulait pas lui donner de faux espoirs, mais c'est ce qu'elle avait compris, et c'était peut-être une piste à poursuivre. Elle doutait fort qu'il ne s'agisse que de rumeurs. je pourrais essayer de me renseigner, si tu veux. Et elle était on ne peut plus sincère... Elle tenait à l'aider. Même si elle ne devrait pas.

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oraline avait bien conscience du fait qu’elle faisait à Joachin une proposition à double tranchant, car il n’était jamais une bonne idée de collaborer avec l’un des sorciers des grottes, et encore moins Dean Appers en personne. D’autant plus que cela contrevenait totalement à ses résolutions premières. Elle ne devrait pas du tout apporter son aide à Joachin, pas après ce qu’elle avait découvert à son sujet, mais c’était plus fort qu’elle, elle ne pouvait pas être insensible à sa détresse. Si la maladie devait bel et bien emporter l’épouse de son père de cœur (car ils étaient toujours mariés, même si certains affirmeraient qu’il y avait prescription), il ne s’en remettrait pas, et c’était une chose qu’elle ne tolèrerait pas, surtout si elle devait admettre qu’elle aurait pu l’aider, ce qui était bel et bien le cas. Coraline jouait donc les entremetteurs entre Joachin et le diable. Peut-être qu’il le regretterait, peut-être qu’elle le regretterait aussi, mais on n’avait rien sans rien, encore moins en notre terre où le sens du sacrifice avait tout intérêt à couler dans vos veines si vous vouliez vous en tirer. Pas forcément rester vivants (pour preuve, tous les deux étaient techniquement morts en dépit de la situation), mais au moins s’en tirer, ce qui était déjà pas mal. En tout cas, Joachin était totalement convaincu par sa proposition, elle sentait même qu’il y mettait tous ses espoirs. Et elle craignait fort qu’ils soient déçus. Car même si elle le présentait au Sorcier, ce n’était pas pour autant que ce dernier parviendrait à ses fins, qu’un remède serait trouvé… mais elle préférait voir Joachin en proie à l’espoir plutôt qu’au désespoir.

-Je te le présenterai, je lui parlerai de toi. Pas forcément dans ce sens, plutôt dans l’autre sens, en fait, bien sûr. Parce que même si elle lui parlait, ce n’était pas pour autant que le Sorcier accepterait de le recevoir… même si elle pensait qu’il avait de bonnes chances. Joachin était de toute évidence désespéré. Et cet homme diabolique se nourrissait du désespoir d’autrui. Mais je te préviens, il ne fait rien gratuitement, il risque de te demander quelque chose de… lourd, en échange.

Quoi ? Elle n’en savait rien, mais quelque chose, c’était certain. Coraline faisait mine d’afficher un air détaché, mais la vérité, quand même, c’était que cette mise en garde n’était pas anodine, elle ne venait pas de nulle part. Coraline appréhendait que le jeu n’en vaille pas la chandelle, et en même temps, il n’y avait sans doute rien de pire pour Joachin que e perdre son épouse… Tout comme Coraline savait bien qu’elle serait capable de tout sacrifier pour Scott, tant pis pour sa sécurité ou pour son intégrité physique ou morale. Il méritait tous les sacrifices. Et Joachin devait penser la même chose. Elle ne se voyait pas forcément lui donner tort, en fin de compte, loin de là, même. Dans tous les cas, c’était dit, et sa parole faisait office de promesse, évidemment.

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oraline se doutait que Joachin était prêt à tout pour son épouse. D'une certaine manière, son histoire lui faisait penser à la sienne. En même temps, c'était sans doute assez logique. Puisqu'ils avaient été transformés plus ou moins en même temps (la faute à qui). Tous les deux avaient vécu une histoire d'amour à nulle autre pareille, au point qu'elle ait survécu à plus de quinze ans d'absence et de silence, et tous deux avaient finalement retrouvé la personne dont leur condition les avait éloignés. Coraline ne savait pas si Joachin se remettrait avec Natasha, mais elle était convaincue que oui, comme elle et Scott avaient dépassé les impossibles pour pouvoir être ensemble. Forcément, pas difficile pour elle de s'identifier à Joachin. Si Scott aussi devait être en danger, elle prendrait des risques inconsidérés, quitte à vendre son âme au diable (ce qu'elle avait déjà plus ou moins fait dans tous les cas) pour que l'homme qu'elle aimait survive, elle consentirait à tous les sacrifices, elle n'aurait pas peur. Après tout, c'était bien de son plein gré qu'elle s'empoisonnait à petit feu pour pouvoir un physique convenable à Scott. C'est pourquoi elle avait fait une suggestion si extrême à celui qui restait son père de coeur malgré tout, parce qu'elle savait que s'il devait découvrir autrement qu'il y avait une solution, et qu'il n'avait pas saisi cette chance, il lui en voudrait, et plus encore il s'en voudrait à lui-même. Elle n'était donc pas forcément fière de sa suggestion, mais considérait malgré tout que c'était la bonne, et que c'était ainsi qu'il fallait agir.

-Tu n'as aucune raison de me remercier, répondit-elle alors.

Et c'était effectivement ce qu'elle pensait. Joachin n'avait effectivement aucune raison de la remercier, et peut-être la maudirait-il même plus tard de lui avoir fait prendre une décision aussi inconsidérée, qui mettrait peut-être sa liberté et sa sécurité, voire sa santé en péril. Elle devrait considérer cela comme une admirable vengeance, un juste retour des choses au nom de tout ce que la jeune femme avait perdu à l'époque à cause de lui, mais elle n'arrivait pas à raisonner de la sorte à l'heure actuelle. Elle n'avait pas cherché à le piéger ou à lui faire du mal, bien au contraire, elle avait seulement voulu le soutenir à sa manière. Le soutenir malgré tout.

-Fais quand même attention, ajouta-t-elle sans avoir pu s'en empêcher.

Elle avait un peu le sentiment, quand même, d'envoyer Joachin au pilori et il est sûre qu'elle n'était ni fière, ni rassurée par cela. Il n'empêche qu'elle savait qu'il ne changerait pas d'avis, donc elle espérait au moins qu'il serait prudent, même si elle ne devrait plus rien espérer le concernant.

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oraline grimaça quand son interlocuteur lui affirma qu'il serait aussi prudent qu'elle-même pouvait l'être. Etant donné qu'elle était tout sauf prudente de son côté, elle ne pouvait que l'interpréter d'une sinistre manière. Malheureusement, ils ne se ressemblaient que trop sur cet aspect. Ils étaient prêt à tout pour les personnes qu'ils aimaient, quitte à mettre leurs propres vies entre parenthèses, ou, bien pire, en danger. Elle aimerait bien pouvoir le dissuader de faire quelque chose de trop inconsidéré ou stupide, mais il ne l'écouterait pas, de toute manière, et ça, elle le savait. Elle espérait juste que les choses iraient bien pour lui, qu'en sauvant Natasha, il n'allait pas se perdre lui-même dans la foulée. Elle sentait bloqués au fond de sa gorge quantité de mots difficiles et douloureux, ou tout simplement tendres. Mais rien ne venait, et elle se disait qu'il valait mieux qu'elle ne dise rien dans tous les cas. Ce n'était pas simple, mais dans tous les cas, elle faisait ce qu'elle pouvait. Elle songea à prononcer quelques mots qui n'auraient pas de sens, mais qui auraient le mérite de combler le silence, mais alors, celui qu'elle considérait encore comme son père de coeur malgré tout ce qu'elle savait, malgré tout ce qu'elle avait appris, sauf que son interlocuteur reprit la parole, et les mots qu'il prononça la prirent un peu de court. C'était... gentil de sa part de s'inquiéter pour lui ? Non, ce n'était pas gentil, c'était juste, naturel... elle n'arrivait pas à s'en empêcher, parce que quoi qu'elle dise et quoi qu'elle fasse, il comptait toujours autant pour elle, et elle craignait pour sa vie.

-J'essaie pas d'être gentille, répondit-elle alors. C'est juste... plus fort que moi, c'est tout.

Et effectivement, c'était le cas... L'avouer, ça la rendait encore plus vulnérable, mais ce n'était pas vraiment quelque chose qu'elle était capable de cacher. Il comptait pour elle, il avait toujours compté, il compterait toujours, et elle devinait maintenant qu'il pourrait bien faire les choses les plus horribles du monde, elle lui pardonnerait quand même, parce qu'elle ne savait clairement pas faire autrement. C'était quelque chose qui faisait partie d'elle... Parce qu'elle n'avait eu que lui pendant très longtemps, après avoir perdu ses parents, puis après avoir perdu Scott.

-Mais visiblement, ça sert à rien, puisque tu m'écoutes pas.

Elle avait esquissé un fin sourire, histoire de lui faire comprendre que son propos n'était pas vraiment sérieux. Et puis, elle ne pouvait pas vraiment lui reprocher de se mettre en danger alors qu'elle lui adressait justement toutes les clés pour le faire. S'il allait trouver le sorcier, c'était à cause d'elle, donc s'il devait lui arriver quelque chose, ce serait aussi à cause d'elle.

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B

on, d'accord, elle ne pouvait définitivement pas donner tort à Joachin, il semblait effectivement évident que si elle lui reprochait d'être borné, l'hôpital se foutait très clairement de la charité car elle aussi était têtue en diable, du genre à n'écouter personne quand elle décidait qu'une décision était la plus juste, même si c'était au détriment d'autres personnes ou contre l'aval de ceux qu'elle estimait. Elle pouvait reprocher à Joachin de prendre des risques pour celle qu'il aimait (des risques qu'elle encourageait, au final, puisque c'était elle qui lui accordait la solution à son problème, bien qu'ayant conscience des éventuelles retombées), mais elle, elle faisait pareil avec cette potion qu'elle ingurgitait à l'excès tout en voyant qu'elle la rendait proprement malade. Donc oui, elle n'avait pas de leçons à lui donner parce qu'elle était exactement pareille que lui. Et il avait raison, qu'elle le veuille ou non, ils se ressemblaient beaucoup... et Coraline ne savait pas vraiment comment elle devait prendre la chose (sa remarque surtout, parce que bon, le constat de leur ressemblance, en revanche, elle n'avait pas attendu, ce moment, cette discussion, pour s'en rendre compte)... Au fond, l'idée de ressembler à Joachin ne lui déplaisait pas totalement. Oui, il était l'homme qui avait assassiné ses parents, mais elle savait au fond d'elle qu'il ne l'avait pas fait par vice ou cruauté, il n'avait seulement pas su s'en empêcher, et elle même avait suffisamment de sang sur les mains (et dans l'estomac) pour le comprendre. Au-delà de ça, ses qualités étaient nombreuses, et même si Coraline avait envie de les nier, elles n'en demeuraient pas moins réelles. Alors quoi ? Elle pourrait accepter cette réflexion comme un compliment, même, mais il y avait ces vieilles rancoeurs, ce besoin de haïr, et ça, quoi qu'elle fasse, ça restait ancré en elle, ça ne disparaîtrait pas... c'était impossible.

-Peut-être, admit-elle finalement pour ne pas faire preuve de trop de mauvaise foi non plus. De toute façon, si elle devait le nier, la nature même de cette discussion viendrait lui donner tort, alors autant admettre d'office ce qui était, pas vrai ? Oui, c'était bien plus simple... et bien plus confortable, aussi. C'est normal, tu m'as un peu élevée, reconnut-elle un peu mal à l'aise, parce qu'évoquer ce fait, c'était le renvoyer à ce qu'il incarnait pour elle, à savoir une figure paternelle forte et solide, sur laquelle elle pouvait s'appuyer, se reposer... Elle avait pu, plutôt... Mais ça change rien, précisa-t-elle ensuite aussitôt, sans doute de manière un peu trop vive, dans l'incapacité totale de ne pas se voiler la face à l'heure actuelle.

A mesure que le temps passait, la réconciliation paraissait de moins en moins impossible. Mais toujours trop difficile malgré tout.

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