On ne connaît jamais vraiment ses amis [p Léo <3]

B

on, tout allait bien, Perséphone n'avait pas fait de gaffe, et Déa avait effectivement dit oui. Perséphone n'en avait jamais vraiment douté, d'une part parce qu'elle ne voyait vraiment pas comment la sirène pourrait dire non, d'autre par parce qu'elle se doutait que son frère de coeur n'aurait pas présenté les choses de cette manière si les choses s'étaient mal passées, mais elle était quand même rassurée de l'entendre. C'était là, vrai, concret : Léo allait se marier, un vrai mariage, avec une fille qui le méritait vraiment, avec une fille qui ne le manipulait pas à tout bout de champ, et surtout, avec une fille qui l'aimait aussi profondément que lui-même l'aimait. Perséphone était infiniment heureuse pour Léo. Si quelqu'un méritait un tel bonheur, c'était bien lui, surtout après ce qu'il avait enduré. Et toute cette situation redonnait un peu confiance à la jeune sorcière par la même occasion. Il était tentant de se dire que l'amour n'était pas fait pour soi, ou n'existait tout simplement pas quand la vie semblait vous l'asséner à longueur de temps, mais Dea et Léo étaient la preuve que l'amour existait bel et bien, et qu'il pouvait triompher, même alors que la situation semblait pourtant désespérée.

Voir Léo ainsi, si heureux, si sûre de lui et de sa nouvelle relation, c'était agréable, mais surtout, c'était beau. Elle l'avait vu dans tous ses états, elle l'avait vu au fond du gouffre. Ils avaient souffert en même temps, de la même situation. Le voir se relever si brillamment, ça la rassurait infiniment sur son propre sort. Pas qu'elle veuille à tout prix se projeter, mais c'était plus fort qu'elle. Tout allait mieux, tout s'arrangeait, et ça lui faisait tellement du bien que de le réaliser.

-Ca se voit, confirma Perséphone avec un sourire quand Léo exprima combien la présence de Déa dans sa vie lui faisait du bien.

Clairement, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure. Depuis que Déa et lui étaient ensemble, il rayonnait, purement et simplement. Elle n'était pas le remède à ses problème, elle n'était pas un pansement posé sur une rupture trop douloureuse, elle était la femme de sa vie, celle qu'il devait aimer après toutes ces épreuves.

-Je suis tellement heureuse de te voir comme ça, si tu savais, ajouta-t-elle avec un fin sourire. Je me dis que tout est possible, qu'ils ne nous ont pas totalement bousillés, dit-elle sans spécifier à qui ce "ils" faisait référence exactement, mais elle ne pensait pas en avoir besoin pour que Léo sache très précisément de qui elle parlait exactement. Tu sais... je crois que j'ai trouvé quelqu'un, moi aussi, qui me rend heureuse.

Il ne s'était encore rien passé de concret entre elle et Owen, mais elle ressentait vraiment qu'il s'en faudrait de peu. Et elle se sentait prête.

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L

a surprise de Léo était évidente, et Perséphone n'avait aucun mal à comprendre pourquoi. Elle ne s'imaginait pas que son frère de coeur puisse ne pas envisager du tout qu'elle finisse par trouver quelqu'un de bien et par se reconstruire sentimentalement, mais elle pouvait se mettre à sa place : elle la première avait cru que dans la situation où elle se trouvait il lui faudrait beaucoup de temps avant que de refaire confiance à un homme, avant que d'ouvrir son coeur à nouveau. Ce qui restait un peu le cas d'ailleurs, car la jeune sorcière ne pouvait certainement pas prétendre être totalement confiante ou rassurée à la perspective de franchir le pas et d'être plus proche d'Owen, raison pour laquelle, peut-être, il ne s'était encore rien passé entre eux... s'il devait se passer quelque chose, car peut-être qu'elle se faisait des films, aussi. Elle n'en savait rien. Perséphone avait beaucoup souffert, Edward l'avait laissée avec le coeur en miettes et encore moins de confiance en elle et dans le sexe opposé qu'elle n'en avait pour commencer. Et au-delà de ça, elle était maintenant mère, une mère célibataire d'à peine dix-huit ans, ce qui serait un tue-l'amour pour à peu près n'importe qui. Mais pas pour Owen, semble-t-il.

Persy ne reprochait pas son indiscrétion à Léo. Si elle avait abordé le sujet avec lui, c'était bien qu'elle voulait en parler, c'était bien qu'elle tenait à évoquer le sujet avec lui. Elle n'avait encore parlé d'Owen à personne. Il faut dire qu'elle avait bien peu d'amis et certainement pas assez confiance pour discuter du sujet à tort et à travers. Elle ne se serait pas vue, par exemple, aborder le sujet avec son cousin, et ça aurait été d'ailleurs de très mauvais ton compte tenu de l'animosité affichée qu'éprouvait Owen envers Julian, et qu'il ne lui avait jamais caché, encore maintenant, au passage.

-Il ne se passe rien du tout... pas pour l'instant, et si ça se trouve, il se passera rien, je sais pas... Elle marqua une pause. Elle n'aimait vraiment pas se sentir à ce point incertaine, elle voudrait bien se l'épargner, mais elle était comme ça, elle avait toujours manqué de confiance en elle, et ce n'était pas demain la veille que les choses allaient changer de ce point de vue. Il s'appelle Owen, je sais pas si tu vois qui c'est... Je le connaissais depuis longtemps mais on s'était jamais vraiment... parlés, tu vois. Et je sais pas, ces derniers temps, on s'est rapprochés, on se voit beaucoup, on parle souvent. J'ai l'impression que je lui plais, même si j'en suis pas sûre du tout et... bref. Dans tous les cas, ça me fait du bien. Je sais qu'il est sincère avec moi. C'est vraiment quelqu'un de bien.

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C'

était vraiment étrange pour Perséphone de parler de tout ça. Après Edward, elle s'était résignée. Elle s'était dit que l'amour, ce n'était pas fait pour elle, que ce n'était plus fait pour elle, et puis, qui voudrait s'embarrasser d'une fille-mère ? Elle avait beau être romantique, cette histoire l'avait quand même singulièrement refroidie. Et pourtant, pourtant... Eh bien... maintenant, Perséphone commençait à se dire qu'elle aurait peut-être la chance de tomber sur quelqu'un de bien, tout compte fait. Certes, elle avait aussi cru que Edward était quelqu'un de bien, mais ça ne voulait pas dire qu'elle était destinée à se tromper éternellement non plus, pas vrai ? Non, peut-être qu'elle aurait droit au bonheur... car après tout, elle le méritait, pas vrai ? Et elle en avait suffisamment bouffé comme ça.

Bon, en attendant, c'était quand même vrai qu'elle faisait très franchement des plans sur la comète alors qu'elle n'avait pas la moindre idée, en réalité, de ce qu'Owen pensait d'elle. Elle avait le sentiment de lui plaire, elle avait l'impression que le courant passait bien entre eux, mais est-ce que ça voulait dire qu'il envisageait quoi que ce soit ? Pas forcément. Oui, ces questions, elle se les posait souvent. Et en définitive, il y avait une manière très simple d'obtenir une réponse. Et c'était d'en parler directement au principal concerné, comme le suggérait judicieusement Léo. Mais à cette seule possibilité, la jeune femme sentait ses joues virer au rouge écrevisse.

-Y songer, oui... mais le faire vraiment... Elle baissa les yeux. Et s'il me trouvait ridicule ? Et s'il m'envoyait balader ? Je sais, au moins je serais fixée, comme ça, mais je sais pas si j'arriverais à supporter d'être... rejetée, de nouveau, tu vois. Tant qu'on s'est rien dit, tant qu'on a rien mis au clair, je peux m'imaginer que c'est possible, et ça me fait du bien mais... Enfin, honnêtement. Avec Samuel, et tout... puis regarde-moi... qui voudrait de moi, honnêtement ?

Elle ne le disait pas pour s'apitoyer sur son sort ou pour partir à la chasse au compliment. C'était une chose qu'elle pensait sincèrement. Elle n'avait pas l'impression de se dénigrer, juste d'exposer un fait. Elle n'était pas excessivement jolie, elle se traînait un paquet de casseroles derrière elle, elle n'avait pas grand-chose pour plaire, et elle apporterait forcément des complications dans la vie de quiconque voudrait bien d'elle.

-C'est peut-être bête, mais s'il doit y avoir quelque chose, je voudrais que ce soit lui qui fasse le premier pas. Je pense pas que je serais capable de prendre les devants de mon côté.

Ce qui voulait donc dire qu'elle pourrait encore se poser des questions pendant un bon moment.

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erséphone savait, bien sûr, qu'elle devrait définitivement travailler sur ce manque absolu de confiance en elle-même qui était constamment handicapant dans son quotidien, mais c'était plus facile à dire qu'à faire, ça. Chaque fois qu'elle envisageait de faire un quelconque effort, elle se retrouvait aux prises avec des tourments de plus grande ampleur, qui la faisaient reculer de plusieurs pas et lui faisaient oublier les quelques pas en avant qu'elle avait conscience de faire. Alors... c'était difficile. Chaque décision, qui pourraient vraiment avoir un impact durable sur sa vie, exigeaient de sa part un effort remarquable et insoupçonné... Et à chaque fois, elle remettait tout en question, absolument tout, à un point qui était probablement difficile pour son entourage qui préférerait - et elle les comprenait très bien, qu'elle lâche du lest. Fort heureusement, c'était là le genre de choses dont elle pouvait parler avec facilité quand elle était en présence de Leopold, parce que ce dernier l'avait toujours parfaitement compris sans qu'elle ait besoin de dire grand-chose, et c'est quelque chose qui l'avait toujours infiniment rassurée, à un point qu'elle aurait même bien des difficultés à décrire. Il comprenait sa position. Perséphone savait que quand il l'affirmait, ce n'étaient pas juste des paroles en l'air, c'était quelque chose qu'il pensait véritablement, une intuition véritable et profonde, et savoir qu'elle pouvait bel et bien se reposer sur lui lui faisait un bien immense, qu'elle aurait bien du mal à exprimer en d'autres termes que ceux qui lui venaient, en cet instant, spontanément à l'esprit.

"S'il en a seulement envie...", ne put s'empêcher de commenter la jeune sorcière quand Léo remarqua qu'il ne restait donc plus qu'à espérer qu'Owen fasse très vite le premier pas... "En plus, je crois qu'il est aussi timide que moi."

Elle ne le croyait pas, elle le savait, c'était d'ailleurs une des choses qu'elle avait trouvées les plus charmantes au moment de se rapprocher de lui... cette réserve dont Edward, de son côté, manquait cruellement. Edward n'attendait pas que l'on donne, il prenait, tout simplement... Owen était... comme elle. Il était différent... pour cette raison, elle savait qu'il ne lui briserait jamais le coeur volontairement... mais elle ressentait malgré tout le besoin impérieux de protéger ce pauvre coeur plus que nécessaire.

"T'as raison... ça va pas servir à grand-chose." Perséphone sourit. Ce n'était pas un reproche qu'elle adressait à Léo, mais c'était la vérité. Elle savait bien qu'elle ne devait pas se dévaloriser, mais il la connaissait assez pour savoir que c'était plus fort qu'elle... et son entourage ne l'avait pas franchement aidée. Elle s'était bien trop souvent senti mise au pied du mur, ce qui était un sentiment  insupportable. "Je ferais un effort." Elle marqua une pause. "Tu crois que tu pourrais... aller lui parler ? Pour sonder son opinion, tu vois..."'

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