Dur, dur d'être un cobaye (Jane <33333)

B

ien sûr, Edward ne pouvait pas croire un seul des mots qu'elle prononçait, parce qu'il était évident qu'elle n'en pensait pas le moindre (et quand bien même il aurait le moindre doute, il la connaissait par coeur), de même, elle aussi ne pouvait rien en croire quand son âme soeur affirmait que lui aussi pouvait considérer que le mieux, c'était encore d'arrêter de l'aimer autant. De toute façon, c'était forcément absurde, parce que les sentiments étaient quelque chose d'incontrôlables. Il n'y avait pas de boutons off, ça n'existait pas. Elle l'avait toujours aimée, plus que tout, et quoi qu'il advienne. Et elle l'aimerait toujours, plus que tout, et quoi qu'il advienne. S'il avait vraiment fallu qu'elle cesse de l'aimer, elle aurait eu mille occasions de voir ses sentiments s'émousser. Quand il avait été violent avec elle, quand il s'était montré dur dans ses propos, cruel dans ses actes. Quand il l'avait trompée... Mais non, elle avait souffert, mais son amour pour lui, par contre était resté le même, toujours aussi fort, toujours aussi intense, elle ne pourrait jamais mettre un terme à ses sentiments pour lui. Peut-être que ça lui ferait du bien, parfois, pour se sentir moins sur les nerfs, moins fatiguée... Mais en même temps, même si leur histoire était sacrément éprouvante, au-delà d'éprouvante, même, sa vie n'aurait pas le moindre sens, sans cela. Elle était complètement folle de lui, et être folle, c'était compliqué, c'était épuisant... mais en réalité, c'était particulièrement agréable, c'était même ultra agréable. Jane n'avait même pas envie de s'en défendre et de prétendre, encore moins à l'heure où elle n'aurait peut-être plus beaucoup d'autres opportunités de montrer à son âme soeur à quel point elle l'aimait. Elle poussa un profond soupir, accompagné d'un fin sourire.

-Tu dois avoir raison, ouais, avoua-t-elle alors, l'air de rien. Tant pis pour moi. Elle marqua un légère pause. C'est pas si grave que ça. Elle reprit la parole. Et puis, au fond, vaut mieux ça, parce que si j'avais pas ça, il me resterait plus grand-chose, là.

Et c'était vrai. Clairement, ce qui la portait, ce qui la rassurait, ce qui l'encourageait, c'étaient ses sentiments à l'égard de son âme soeur. Elle ne savait pas ce qui allait se passer, elle avait bien conscience qu'il était très probable qu'ils ne s'en sortent pas. Mais ils survivaient malgré tout, parce que leurs sentiments l'un pour l'autre étaient forts, intenses, sûrs. S'ils n'avaient pas cela, si elle n'avait pas cela, elle aurait renoncé depuis longtemps déjà. C'était pour lui, pour eux, qu'elle tenait bon. Heureusement, vraiment, qu'elle était amoureuse de lui, et à ce point. Ca lui bousillait la vie et la lui sauvait en même temps.

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ane avait bien souvent douté des sentiments d'Edward, parce qu'elle n'avait pas forcément confiance en elle (surtout dans ce domaine), parce que les circonstances ne l'avaient pas aidée et parce que son amour pour Edward était si fort qu'il la dépassait bien souvent. Mais elle avait évolué, elle avait compris. Maintenant, elle aussi, quand son âme soeur lui disait "Je t'aime", elle pourrait réplique qu'elle savait, comme le jeune homme s'était si souvent amusé à le faire, parce qu'elle le savait en effet. Elle l'adorait au-delà de ce que les mots pouvaient bien décrire, et maintenant, elle savait que c'était entièrement réciproque. Quand Edward affirmait qu'elle ne risquait pas de perdre ce sentiment qui lui communiquait tant de force, elle y croyait bel et bien, elle le ressentait au plus profond d'elle-même. Elle parvenait encore à sourire d'une oreille à l'autre, son coeur parvenait encore à battre avec une intensité sans faille, elle parvenait encore à éprouver un vrai frisson de plaisir, juste parce qu'il lui disait qu'il l'aimait. Il y avait cette horrible cellule, froide et humide. Il y avait la faim, la douleur, la peur, l'obscurité, mais son sourire demeurait, parce qu'elle entendait les mots les plus tendres et les plus beaux qui pourraient bien lui parvenir aux oreilles, le genre de mots qui lui donnaient de la force, du bonheur, de la joie dans le malheur... Il avait sur elle un effet incroyable, un effet dingue. Elle l'aimait plus que tout, elle aussi, et c'était la chose la plus importante au monde. Elle était folle de lui. Folle au sens propre comme au figuré. Et ça, c'était tout simplement incroyable.

-T'as vraiment eu une vie de merde, plaisanta-t-elle alors quand il affirma alors qu'elle était la plus belle chose qui soit arrivée dans sa vie.

Ces mots la touchaient, ils la touchaient sincèrement, c'étaient des mots qu'ils avaient eu du mal à se dire, et qui tenaient dorénavant de la plus pure évidence. Lui aussi était la chose la plus belle qui était arrivée dans sa vie. La plus pure, la plus forte, la plus évidente, mais la plus douloureuse, la plus inquiétante et la plus perturbante en même temps. Il avait façonné sa vie entière à leur image. Et même si ça les avait propulsés à cet instant précis, eh bien, tant pis, pas de regret. Ils étaient responsables de leur situation au-delà de chaotique, c'est évident. Mais ils le voulaient, en même temps, c'était clair et net. Alors oui, ces mots la touchaient, mais elle restait elle-même quand même, et elle ne pouvait s'empêcher de piquer un peu son âme soeur. Elle avait du mal avec les grandes déclarations, même si ils n'avaient de cesse de s'en faire et que la situation était appropriée.

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ane savait bien qu'elle aurait pu répondre quelque chose de plus tendre ou de romantique que ce qu'elle avait fait, mais en même temps, ce n'était pas comme si elle avait manqué de le faire, jusqu'alors, elle avait redoublé d'attentions et de déclarations depuis qu'ils étaient enfermés ici, parce qu'elle savait que c'était maintenant ou jamais que la jeune femme pouvait lui apprendre tout ce qu'elle avait sur le coeur. Mais en même temps, même si elle était folle amoureuse de lui et ne manquait pas de le dire, un peu de bonne humeur et d'humour ne faisait pas de mal non plus, et de toute évidence, Edward n'avait pas pris mal sa réflexion. Peut-être que ça aurait été le cas en d'autres circonstances, parce qu'ils étaient tous les deux beaucoup trop fiers et susceptibles, c'est certain. Mais il connaissait le fond de sa pensée, et il ne la croyait pas, tout comme elle-même ne le croyait pas du tout. Non, ce n'était pas tout ce qu'elle avait à dire. Si elle pouvait vraiment répondre au jeune homme en lui ouvrant son coeur (elle le pouvait, mais ils s'en lasseraient tous les deux en même temps, c'était on ne peut plus évident), elle en aurait pour des heures et des heures, car elle pourrait bien se montrer tout bonnement intarrissable. Elle ne manquerait jamais de mélioratifs et de mots tendres pour lui exprimer combien elle l'aimait, à quel point il comptait pour elle, mais elle considérait avoir déjà donné beaucoup de sa personne en l'occurrence. Il ne pourrait pas prétendre qu'elle se montrait trop sévère et insensible, loin de là, même.

-Oui, je suis terriblement cruelle, répliqua-t-elle dans un sourire en coin. Et je sais que c'est ce que t'aime chez moi, affirma-t-elle alors.

Elle espérait bien que non. Bon, elle était cruelle, il lui arrivait de l'être, et c'était l'un de ses pires défauts, mais elle ne doutait pas un seul instant du fait que c'était une qualité à ses yeux. Elle supposait que c'était comme pour elle. Ses défauts se changeaient en qualités. Ce n'était pas forcément une bonne chose, c'est sûr, mais c'était comme ça malgré tout, c'était un fait quoi qu'il arrive. Et en l'occurrence, ça l'arrangeait bien. Ceci dit, elle n'était pas cruelle en cet instant, on ne pourrait pas lui reprocher ce défaut en cet instant, plutôt celui d'être si follement amoureuse qu'elle était tout bonnement incapable d'observer l'inévitable. Cet inéluctable qui voulait que leurs vies touchent à leur fin très, très rapidement, réellement.

-Je ne vis que pour te faire souffrir, encore et encore et encore, affirma-t-elle ensuite en se blotissant contre lui, le plus doucement possible pour ne pas lui faire mal.

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est sûr, Jane n'avait rien de crédible quand elle affirmait être une personne cruelle et insensible, vouée à faire souffrir plus que tout son âme soeur quand, à côté de cela, elle se blottissait dans ses bras avec toute la tendresse et toute l'affection du monde. Cruelle et insensible, elle l'était parfois, mais certainement pas maintenant, et encore moins auprès d'Edward, qu'elle aimait plus que tout. La faire souffrir était la dernière chose qu'elle puisse désirer pour l'heure. Pour le moment, ce à quoi elle aspirait avant tout, c'était à son bonheur, à lui apporter un minimum de lumière dans l'obscurité du moment. Elle voulait l'apaiser, le rassurer, le soulager, l'adorer, l'aimer. Et donc, oui, loin de chercher à le faire souffrir, elle essayait avant tout à se perdre dans le contact de sa peau contre la sienne, dans le refuge de ses bras où, à tant de reprise, elle s'était sentie renaître, revivre, tout simplement. Non, la dernière chose qu'elle puisse vouloir était clairement de lui nuire ou de lui faire du mal. Elle esquissa un fin sourire quand son âme soeur lui fit remarquer que sa manière d'agir était on ne peut plus incohérente. Elle était totalement d'accord avec ça. Mais évidemment, elle s'en foutait, puisqu'elle ne cherchait pas à l'être, et elle était convaincue, tout autant, du fait que le jeune homme préférait largement qu'elle soit tendre, douce et prévenante en sa compagnie plutôt que de se montrer rude et complètement détestable. Elle était malgré tout toujours d'humeur taquine, parce que ça avait le mérite de les soulager et de les rassurer du mieux possible. Prétendre que la situation n'était pas grave en détournant les faits, en plaisantant comme si les circonstances pouvaient réellement s'y prêter, c'était un bouclier, une force, un moyen comme un autre de canaliser toutes les émotions négatives qui menaçaient de dominer. Alors forcément, Jane entrait dans le jeu d'Edward.

-Si tu veux, je peux appuyer là où ça fait mal, affirma-t-elle donc d'un ton égal.

Et cela, clairement, s'entendait dans deux sens différent. Elle pouvait bien décider de le piquer mentalement, exactement. Elle connaissait clairement ses faiblesses, elle connaissait clairement les sujets de conversation qui pouvaient le pousser à bout (mais elle n'avait pas spécialement envie de s'y coller pour autant, il faut bien le reconnaître), et cela pouvait aussi s'entendre au sens propre au sens où il suffirait qu'elle s'appuie un peu trop fort sur le torse du jeune homme pour qu'il ait vraiment, vraiment très mal. Mais bien sûr, ce n'était pas du tout son intention. Elle ne voulait que son bien, et elle déplorait déjà terriblement de le voir souffrir. Elle était loin de vouloir voir les choses empirer, bien au contraire, même.

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ane appréciait, au fond, de constater qu'ils étaient encore capables de se vanner et de se lancer des piques tous les deux malgré les circonstances pitoyables dans lesquelles ils se trouvaient. Cela pouvait sembler absurde de se chercher ainsi mutuellement alors que la situation était à ce point chaotique et catastrophique, ils devraient s'élever plutôt que de s'enfoncer... Sauf qu'elle avait le sentiment qu'ils s'élevaient tout en s'enfonçant. Elle aimait qu'ils sachent se complimenter et se faire des grandes déclarations à un moment, puis de se traiter de tous les noms (d'oiseaux, qu'ils ne pensaient évidemment pas) l'instant d'après. C'était bien la preuve, à ses yeux du moins, que leur histoire était solide. Ensemble, ils étaient capables de supporter ce nouvel obstacle, en restant tout simplement eux-mêmes. Le supporter... pour ce qui était de le dépasser, ça restait à voir, mais dans tous les cas, ça lui faisait du bien. Elle parvenait à oublier les pensées déplaisantes pour se focaliser sur des pensées bien plus positives. Elle adorait le taquiner, c'était une de ses activités préférées, et, clairement, Edward le lui rendait bien, comme il le lui prouva en cet instant. Elle hocha la tête, prétendument sûre d'elle quand le jeune homme lui demanda, faisant mine d'être offusqué à l'idée qu'elle appuie où ça fait mal alors qu'il était si fragile. Au fond, c'était vrai, loin d'elle l'idée de lui faire du mal, parce que la situation ne s'y prêtait pas du tout, bien sûr, mais aussi parce qu'il souffrait bien assez comme ça... parce qu'il était trop fragile, oui, en effet.

-Ouais, je déteste les trucs amorphes, ça m'agace ! affirma-t-elle en souriant.

Elle baissa le regard sur son entrejambe. C'était une blague très facile et au bas de la ceinture (c'est le cas de le dire), mais en même temps, ils n'étaient pas toujours très subtils. Ceci dit, c'était vrai aussi que les grosses larves qui foutent rien l'énervaient. Alors qu'elle aussi n'en glandait pas une... En fait, elle détestait l'inactivité quand elle-même était contrainte à l'activité pour une raison ou pour une autre. Ceci dit, elle ne blâmerait clairement pas Edward d'être diminué en cet instant, c'était normal, et elle avait mal pour lui, elle souffrait avec lui, elle détestait le voir si mal. Elle tournait son état à la plaisanterie parce que c'était plus simple de le moquer que d'admettre ce qui était. Parce que la vérité, c'était qu'elle était affreusement inquiète pour son âme soeur. Elle détestait le voir dans cet état lui faisait un mal incroyable. Ce n'était as juste qu'elle ressentait sa douleur, c'était bien plus fort que ça, bien plus terrible que ça...

-Mais j'ai pitié de toi, va.

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ane savait pertinemment que heurter un homme dans sa virilité n'était pas une bonne chose, s'il y avait bien un domaine ô combien sensible pour la gent masculine, c'était celui-là, et en l'occurrence, le jeune homme n'y pouvait absolument rien, il était diminué par la force des choses, et il était en souffrance, surtout... Et Jane était bien loin de vouloir le dévaloriser ou le vexer, et elle espérait bien quand même qu'Edward l'ait compris. Elle se contentait de lui balancer une pique comme il lui arrivait de lui en balancer d'autres, parce que c'était un réflexe et parce que ça leur permettait de s'évader d'un quotidien qui avait tout de proprement terrifiant. Jane était loin de reprocher à Edward de ne pas être au meilleur de sa forme, bien au contraire, elle avait mal pour lui, et elle était terrifiée à l'idée qu'il ne se remette pas de son mal, et ce n'était pas parce qu'elle craignait de ne plus être satisfaite d'un point de vue physique ou parce que sa douleur se répercutait sur la sienne, c'était juste parce qu'elle avait peur, peur pour lui, peur de le perdre, et ça s'arrêtait là. S'il devait ne jamais se remettre complètement de ses blessures, d'ailleurs, et restait, à certains points de vue... amorphe, ce n'était pas pour autant qu'elle se détournerait de lui, bien au contraire, même. Elle l'aimait plus que tout, et l'épreuve qu'ils étaient en train de vivre avait au moins ce mérite, leur rappeler que leur relation était plus puissante qu'une pure relation physique. Leur lien était avant toute chose spirituel, c'est seulement qu'ils n'avaient pas eu l'audace et l'humilité de l'admettre avant longtemps.

-Je ne me fais aucun souci pour ça, affirma-t-elle alors quand Edward lui promit qu'il ne serait pas toujours amorphe.

Elle préférait l'entendre parler comme cela, surtout parce que s'il s'exprimait de la sorte, c'est qu'il caressait l'espoir de s'en sortir, c'est qu'il pensait échapper à cet enfer, et elle aussi voulait encore y croire. Tant qu'ils étaient en vie, l'espoir restait permis. Et ils allaient se battre, du mieux qu'ils le pouvaient, à leur échelle. Et le moment venu, ils reprendraient le cours de leur vie, ils la vivraient enfin comme les événement leur empêchait de la vivre constamment. Elle déposa ses lèvres sur les siennes une nouvelle fois. Elle n'en pouvait plus de cette situation, elle voulait qu'ils se tirent d'ici, qu'ils se retrouvent chez eux, qu'Edward puisse recevoir des soins adaptés à sa condition. Elle voulait qu'il garde la foi, qu'il soit fort.

-Amorphe ou pas, je t'aime plus que tout.

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ane leva les yeux au ciel quand le jeune homme répliqua qu'il savait qu'elle l'aimait. Bon, c'était de bonne guerre, et au fond, même si elle s'agaçait au début de cette taquinerie, elle avait fini par y prendre goût. Par ailleurs, ils s'étaient suffisamment dit qu'ils s'aimaient tous les deux pour qu'elle n'ait pas vraiment besoin de l'entendre. Lever les yeux au ciel, en la circonstance, c'était plus une manière de marquer une fausse exaspération que de réellement s'agacer de cette réponse. De toute façon, ça l'arrangeait, qu'il le sache. Elle voulait qu'il le sache, parce qu'ils n'avaient aucune idée de ce qui allait se passer, et si ça devait être leurs derniers instants, autant faire en sorte qu'il ait eu sa dose de démonstrations d'affection dont elle avait été avare pendant bien longtemps. Elle esquissa un sourire en coin quand il affirma que s'il avait su qu'il fallait qu'il subisse tout ça pour quele lui dise plus facilement qu'elle l'aimait, il l'aurait fait plus tôt. C'est qu'il y avait un fond de vérité là-dedans, si elle n'avait de cesse que de lui exprimer ses sentiments, au point qu'elle ne lui avait sans doute pas dit autant de fois qu'elle l'aimait depuis les débuts de leur relation que depuis qu'ils étaient enfermés, c'était bien parce que leur sort l'inquiétait. Elle ne savait pas combien d'autres occasions ils auraient, alors elle se rattrapait pour toutes les fois où elle avait eu envie de le dire et ne l'avait pas fait, parce qu'elle avait cru que ces mots étaient maudits, parce qu'elle avait eu du mal à l'assumer. Maintenant, elle savait que ce qui était maudit, ce n'étaient pas les mots, c'était elle, c'était eux. Alors si ils pouvaient plaire à son âme soeur par leur simple existence, elle n'allait pas s'en priver.

-Profites-en bien, alors, parce que dès qu'on sera sortis d'ici, tu ne m'entendras plus le dire avant un bon moment, prétendit-elle sans le penser, parce qu'à force, lui dire "Je t'aime" lui devenait aussi simple, essentiel et évident que de respirer. Je suis en train d'expirer mon quota de "Je t'aime" pour au moins une année.

C'était une plaisanterie, oui, mais au fond, il y avait peut-être un peu de vrai. Les mots "Je t'aime" étaient importants, pour elle, ils avaient une profondeur, un intérêt, un sens, ils renfermaient quelque chose de fort et de réel. A trop les dire, elle avait peur qu'ils deviennent banals, qu'ils perdent l'intensité qu'elle voulait leur donner. Alors en faire une denrée rare, c'était une technique comme une autre, au final.

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ane n'aurait clairement pas pensé ainsi à une certaine époque, et certainement moins encore en ce qui concernait Edward, et pourtant, elle savait bien qu'elle serait proprement incapable de tenir une année entière sans dire à Edward à quel point elle l'aimait. Ces mots avaient de l'importance pour elle, oui, autant quand elle les disait que quand elle les entendait. C'était pour cette raison qu'elle ne voulait pas en gâcher la magie, mais elle ne pensait pas prendre de risques avec Edward, parce que c'était évident. Au fond, ce dernier avait raison, ils n'avaient techniquement pas besoin de se le dire. Il suffisait qu'ils regardent dans les yeux l'un de l'autre pour savoir, pour comprendre, pour n'avoir normalement aucun doute. Il suffisait d'être à l'écoute des sensations de l'autre. Puisqu'ils ressentaient ce que l'autre ressentait, c'était logiquement une valeur sûre. Pourtant, ça ne suffisait pas toujours, Jane était capable de douter au-delà de l'évidence quand elle s'y mettait, mais c'est surtout parce qu'elle avait peur de perdre son âme soeur comme elle avait perdu tant de personnes à qui elle tenait. Et les récents événements n'avaient pas forcément aidé sa confiance non plus, au passage... Pour l'heure, néanmoins, elle ne doutait plus, c'était beaucoup trop évident pour que la question se pose encore. Ce qu'ils étaient capables d'endurer l'un pour l'autre, qui donc pouvait bien s'en targuer, hein ? A sa connaissance, absolument personne.

-J'adore te voir faire des efforts, répliqua-t-elle, l'air de rien, un sourire aux lèvres, de ces sourires qu'il était le seul à savoir faire naître dans l'obscurité déroutante et désagréable d'une grotte hostile où la torture et la séquestration étaient devenus le quotidien. Encore plus si c'est pour moi. Si j'étais toi, je m'entraînerais tout de suite, ça doit pas être évident de dire "Je t'aime" sans arrêt, comme ça.

En fait, elle avait envie de croire que c'était au contraire très simple, parce qu'ils l'éprouvaient trop pour ne pas l'exprimer, au oint que la plus réticente qui puisse être à ses déclarations, à savoir elle, cède à cette envie, à ce besoin pour ainsi dire impérieux, nés de ce sentiment qu'ils n'avaient jamais su contrôler, et qui maintenant les dominait totalement, sans l'ombre d'un doute. La tendresse, ce qu'ils ressentaient, c'était de toute façon leur seule arme pour le moment. Si ils n'étaient pas ensemble, s'ils devaient endurer l'épreuve chacun dans une cellule séparée, trop loin pour sentir la chaleur, suffisamment près pour que leurs douleurs se répercutent l'une sur l'autre, elle n'arriverait tout bonnement pas à le tolérer, à l'accepter, ce serait à ses yeux proprement insurmontable.

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on, Jane ne sous-estimais pas Edward. Bien au contraire, même, elle l'estimait sans doute plus que n'importe qui d'autre en ce bas monde, elle avait plus d'un reproche à lui faire, elle lui trouvait plus d'un défaut, mais elle restait très clairement la personne qu'elle aimait et estimait le plus au monde. Et pour le coup, il n'avait pas tort, il avait bien moins de difficultés qu'elle à dire ce qu'il ressentait, au point même, d'ailleurs de lui avoir dit qu'il l'aimait bien avant qu'il ne puisse être convenable pour eux de le dire, quand ils n'envisageaient aucun avenir ensemble et acceptaient à peine la nature de leurs sentiments, et elle était heureuse qu'il sache prendre les devants. Parce que, égoïstement, elle aimait qu'il lui dise ce qu'il ressentait pour elle (même si elle avait parfois du mal à le croire, par manque absolu de confiance en elle plus que par manque de confiance en lui) sans forcément le lui rendre assez. Elle ne savait pas si son reproche déguisé était totalement sincère quand il affirmait que se déclarer pour eux deux ne lui demanderait pas beaucoup plus de temps et d'énergie que d'ordinaire (elle était moins avare en mots tendres qu'avant, quand même), mais il devait y avoir un fond de vérité tout de même. Et peut-être qu'une fois sortis de là, il faudrait qu'elle fasse un peu plus d'effort. Elle pouvait bien prétendre qu'elle se calmerait une fois qu'ils seraient sortis de là, cette expérience lui apprenait que leurs vies étaient définitivement très fragiles, et qu'il ne fallait pas hésiter à se dire les choses pour ne pas avoir de regrets. Ceci dit, même si elle le pensait, elle n'allait pas non plus le reconnaître si facilement. Ne serait-ce que parce qu'elle aimait l'idée qu'il apprécie d'autant plus chacune de ses déclarations qu'elles étaient relativement rares.

-En même temps, tu te déclares déjà pour deux, donc ça compense, affirma-t-elle alors, ce qui n'était pas totalement vrai non plu, mais renfermait quand même un fond de vérité, une fois de plus. Une preuve de plus s'il en fallait encore qu'ils se complétaient à la perfection, et ça dans tous les domaines. Elle marqua une légère pause. T'aimerais que je te le dise plus souvent ?

Sa question était vraiment sincère. C'étaient des considérations qui en soi n'avaient pas forcément beaucoup d'importance, mais après tout, que pouvaient-ils faire d'autre sinon ? Ils avaient tout le temps de parler ensemble, de communiquer comme ils ne le faisaient pas toujours en temps normal. S'ils ressortaient de cette aventure, leur couple s'en verrait clairement renforcé, c'était une évidente et infinie certitude. Ce qui ne les tuait pas les rendait plus forts, une chance, ils ne se laissaient pas tuer si facilement.

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ane haussa les épaules quand son âme soeur lui demanda si elle croyait vraiment qu'il puisse tenir à ce point à ce qu'elle lui dise davantage ce qu'elle ressentait pour lui. La vérité, c'est qu'elle n'en savait rien. Elle n'avait pas l'impression d'être totalement chiche en déclarations non plus, même s'il fallait parfois la pousser un peu pour qu'elle passe aux aveux (mais c'était plus un jeu qu'autre chose), ceci dit, il est vrai que tout ça n'était pas très équitable. Jane pourrait comprendre qu'Edward souhaite qu'elle soit plus éloquent à ce sujet, étant donné qu'elle-même avait quelque part besoin des déclarations de son époux pour se réconforter, pour être sûre d'eux, alors que leur relation en elle-même était une infinie certitude. C'était compliqué à expliquer, en fin de compte. Leur histoire était si passionnelle, leurs sentiments si forts que parfois, elle se disait que ce n'était pas possible. Absurde considération, mais considération bien réelle malgré tout, et au-delà de l'explicable. Elle apprécia malgré tout que le jeune home affirme qu'il voulait qu'elle parle quand elle le sentait, quand elle en avait l'envie... Le soucis, c'est que si l'envie lui manquait rarement, elle éprouvait toujours une sorte de blocage. Comme si prononcer trois simples mots pouvait avoir l'effet d'une bombe à retardement. Parfois, ce n'est pas franchement simple de se défaire de ses vieilles superstitions, même quand on sait qu'elles sont diablement absurdes. Et elle le savait. Aimer Edward n'avait peut-être pas conjuré la malédiction, parce que les emmerdes continuaient d'être légion, encore, mais c'était loin de leur faire du mal, et leur amour n'était pas de ceux qui s'éteignent, alors... Faute de répondre, donc, parce qu'elle aurait bien des difficultés à s'exprimer sans être, comme bien souvent quand on entrait dans le registre des sentiments, confuse, elle décida de répondre plutôt à la dernière remarque de son interlocuteur, où là, pour le coup, la réponse coulait tout simplement de source.

-Ca tombe bien, j'adore négocier, affirma Jane, sourire au coin des lèvres, quand il assura que lui-même pourrait bien le lui dire sans arrêt, ou du moins que c'était négociable.

Bon, objectivement, Jane se lasserait sans doute rapidement s'il n'avait plus que ces trois mots aux lèvres, mais elle apprécierait quand même de voir combien de temps il serait capable de tenir à ce rythme. Elle gageait que ce serait plutôt intéressant à découvrir, et flatteur pour son coeur et son égo. Mais qui dit négociations dit bien évidemment contreparties, et ça aussi, ça ne manquait pas de grandement l'intéresser en réalité. De toute façon, ils n'avaient rien de mieux à faire que ce genre de plan sur la comète, après tout. On pouvait même dire que c'est ce qui les maintenait en vie.

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égocier ne la dérangeait pas, non, on pouvait même dire qu'elle en avait pris l'habitude, à force de ne pas se contenter de ce qu'on lui proposait, mais ses négociations avec Edward étaient forcément les plus intéressantes, les plus passionnantes, parce que l'enjeu était toujours beaucoup plus séduisant. Bon, ce pouvait aussi être un prétexte à des prises de tête interminables, sachant que tous les deux, avec leur sang chaud bien connu, étaient capables de partir en vrille pour vraiment pas grand-chose. Mais quand ils savaient modérer leur tempérament, ces négociations étaient en fin de compte quelque chose de plutôt agréable et plaisant, ils s'amusaient de tout cela, ils se taquinaient, et c'était aussi ce qui faisait le sel de leur relation, l'air de rien (relation qui, même quand elle n'était pas salée, ne manquait pas de piment, si l'on veut poursuivre sur les métaphores culinaires beaucoup trop faciles). Alors oui, elle était très honnête quand elle affirmait adorer négocier, même si, en l'occurrence, le jeu n'en vaudrait peut-être pas la chandelle, car même si elle adorait entendre son âme soeur lui dire qu'il l'aimait, et qu'elle ne pensait pas se lasser de l'entendre lui faire ce genre de déclarations qu'elle trouvait au-delà d'agréable, il se pourrait quand même qu'entendre ces mots à répétition, sans aucune autre forme de conversation, l'agace un chouias, mais ils n'en étaient pas là, et dans tous les cas, ils savaient tous deux qu'ils ne devaient pas trop prendre au sérieux ce qu'ils disaient présentement. Ils cherchaient surtout un moyen de tromper le temps, d'oublier la peur et la douleur. Et force était de constater que c'était plutôt efficace, en fin de compte, bien assez efficace en tout cas pour que la jeune femme oublie presque les barreaux de leur cage, la dureté du sol, le froid et l'humidité de l'air et la puanteur ambiante.

-Quand on sortira d'ici, dit-elle alors, le regard planté dans le sien, je ferai tout ce que tu voudras.

Et ça voulait absolument tout dire. Tout ce qu'il voudrait, ça pourrait bien vite la faire devenir chèvre s'il en profitait pour la réduire en simili-esclavage, mais malgré tout, elle était très sincère dans son propos. Elle voulait faire absolument tout ce qu'il voudrait, parce qu'il le méritait, parce que c'était important à ses yeux de l'aider à se remettre de cette épreuve, et elle comptait bien le dorloter comme elle ne l'avait jamais fait quand ils auraient retrouvé leur chez-eux, trop heureuse qu'elle serait, déjà, de le retrouver entier. Quand ils sortiraient d'ici, s'ils sortaient d'ici, oui, elle mettrait tout son orgueil de côté et serait à son entière disposition. Que faire d'autre en même temps ? Elle se devait de tout faire pour lui.

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ane savait bien qu'elle s'aventurait sur un terrain dangereux en affirmant qu'elle accorderait tout ce qu'il voudrait à Edward, elle savait bien que c'était là un privilège dont elle n'hésiterait pas à abuser à outrance (ne serait-ce que, parce que dans le cas inverse, elle ne s'en priverait pas, en ce qui la concernait). Mais le fait est qu'elle disait ces mots sincèrement, c'était une chose qu'elle regretterait peut-être plus tard, mais qui lui semblait tout naturelle sur le moment, parce qu'elle avait envie, besoin, même, de prendre soin de lui. Elle savait qu'il allait mal, et elle ne le supportait pas, c'était intolérable. Le voir souffrir la faisait souffrir. Pouvoir ou non, ça n'y changerait rien, elle en était sûre, son empathie allait au-delà de ce qui s'éprouve physiquement, c'était en elle, et oui, pour la peine, elle ne comptait pas démentir. Tant pis si elle devait regretter (ou faire mine de regretter) quand ils sortiraient de là (encore fallait-il qu'ils sortent de là, et même s'ils en parlaient comme d'un événement à venir inévitablement), elle était convaincue de ce qu'elle disait, elle était sûre qu'il le fallait, que c'était nécessaire. Edward allait avoir besoin de soutien, de réconfort, d'un appui sûr, et elle avait envie de lui donner tout ça, d'autant plus qu'elle se sentait responsable de ce qui leur arrivait, de ce qu'il avait subi. Certes, Léo était responsable, mais s'il était responsable, c'était à cause d'elle, à cause de ce qu'elle lui avait fait subir. Inutile de revenir là-dessus, c'est certain, mais en tout cas elle ne reviendrait pas sur sa promesse, elle n'en avait pas la moindre intention.

-Pas la moindre, affirma-t-elle dans un sourire complice quand Jane lui demanda de confirmer qu'elle ne lui opposerait pas de résistance en fonction de ce qu'il lui demanderait. En vérité, de la résistance, il finirait ans doute par l'agacer plus tôt que prévu et donc, oui, elle jouerait les fortes têtes avec lui, mais elle n'en était pas là pour l'instant, et elle voulait juste ce qu'il pouvait y avoir de mieux pour lui, parce que ce qu'il y avait de mieux pour lui était aussi ce qu'il y avait de mieux pour elle. Tu pourras faire tout ce que tu veux de moi.

Bien sûr, cette réponse ne pouvait s'entendre qu'avec quelques sous-entendus moins qu'innocents. Mais en même temps, ils l'auraient bien mérité le moment venu. Elle avait hâte de retrouver leurs vieilles et insatiables habitudes, ça lui manquait, et ça lui manquait surtout parce qu'elle avait peur qu'ils ne se retrouvent plus jamais comme autrefois, mais elle devait continuer d'y croire malgré tout.

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ane afficha un sourire de circonstance quand son âme soeur lui assura qu'il avait une idée bien précise de la manière dont il allait s'occuper d'elle le moment venu (donc quand ils sortiraient de là tous les deux - l'espoir fait vivre, en l'occurrence, cette expression n'avait jamais été aussi juste), oh, elle en était convaincue, et elle était certaine que ce qu'il avait à l'esprit rejoignait parfaitement bien ce qu'elle-même ne savait que trop avoir à l'esprit. Et s'ils restaient sur ce terrain-là, ils ne devraient être laisés ni l'un ni l'autre en fin de compte, car satisfaire Edward, ça revenait bien souvent à se satisfaire elle aussi, à quelques exceptions près, quand le jeu allait trop loin, quand son égo était blessé ou quand elle se sentait vexée (et ça arrivait sans doute bien plus souvent que nécessaire, il faut le reconnaitre). Puisqu'il lui affirmait qu'elle adorerait toutes ces choses, il la croyait sur parole sans douter un seul instant, elle était même certaine que ça lui plairait infiniment, et au-delà de ce que les mots peuvent bien décrire, d'autant que cette situation imposait la frustration et le manque, et il y avait plein de choses qu'ils ne pouvaient pas se permettre de faire ici, qui faisaient pourtant partie de leurs habitudes. Pas juste des choses qui concerneraient forcément un rapprochement charnel, d'ailleurs. Le simple fait de le prendre dans ses bras sans craindre de le faire souffrir, ce serait déjà très agréable à ses yeux, et largement suffisant pour qu'il n'y ait pas besoin d'y ajouter quoi que ce oit d'autre en fin de compte. Elle lui adressa un regard de défi quand elle osa supposer qu'il ne tiendrait pas la cadence. C'est qu'il la sous-estimerait presque s'il ne s'agissait pas juste ici de tendre provocation sans arrière-pensée au-delà de ça, parce qu'ils savaient bien qu'ils avaient le même rythme, c'était même là tout l'intérêt de la chose.

-Tu me déçois, je suis inépuisable. Tu devrais le savoir pourtant.

Et justement, elle savait forcément qu'elle n'était pas si inépuisable que ça en définitive, même si elle savait parfaitement tenir la cadence quand il le fallait et surtout quand elle le voulait... Bizarrement, elle avait bien plus tendance à le vouloir quand elle était en présence d'Edward que pour n'importe quoi d'autre au quotidien, où elle traînait très clairement la patte sans esquisser le moindre effort, même celui qui se révèlerait être le plus élémentaire possible. Non, elle n'était pas inépuisable, mais elle avait de le ressource, et elle le lui prouverait le moment venu.

-Et de toute façon, tu n'obtiendras rien du tout si tu ne remplis pas ta part de marché.

C'était un marchandage, oui, donc ça allait dans les deux sens.

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